Texte-source: Yiheyuan Changlanghua Gushiji, XinWensheng, Beijing 1985
001_尧王访舜
« Il était une fois un bon roi, du nom de Yao, qui menait une vie simple et qui veillait sur le bien-être de son peuple. Après une centaine d’années de règne, vieillissant, il songea à lui donner un successeur vertueux, comme lui-même le fut. Son propre fils, de l’autre coté, se comportant selon ses besoins
égocentristes seulement, n’y entrererait pas en ligne de compte! Du coup, il envoya des messagers pour obtenir des renseignements sur des individus convenables. De partout, les chefs de tribu lui indiquèrent un seul jeune homme, du nom de Shun. Dans sa plus tendre enfance, Shun avait perdu sa mère et dorénavant fut élevé par la belle-mère. Par contre, elle le maltraitait – souvent; néanmoins, il continuait de servir son père et même choyait les enfants de sa belle-mêre. Mais, bien que sa piété inébranlable à l’égard de ses parents vite devint proverbiale dans le pays, sa belle-mêre effectivement en voulait à sa vie: donc il s’en alla, habiter la montagne. Au pied du mont Li, il se dressa une cabane et défricha un petit coin. Vivotant tout seul, il restait enfoncé dans une tristesse profonde – observant le coucou voler avec les autres oiseaux, l’oiseau femelle donner la becquée à leur petits: le voici: chantonnant ses sentiments intérieurs, au pied du montagne, tout seul. Mais, ce ne fut pas longtemps que le voisinage fut influencé par ce comportement bien vertueux de Shun. Peu à peu, les paysans lui cédèrent la lisière de leurs champs et les pêcheurs leurs zones de pêche. Et quand lui même, il faisait de la poterie, toute la poterie aux
alentours acquit d’une qualité supérieure! Ainsi automatiquement, le lieu même où habitait Shun s’élargissant de jour en jour! Le moment où Yao entendit cette nouvelle, il fut ravi et rendit visite, en personne, à ce paysan tout-à-fait quelconque! Finalement, il lui céda la royauté et en plus, lui donna ses deux filles pour épouses. Shun régnerera pendant plusieurs décennies et contribuera beaucoup à l’interêt commun. Comme son prédécesseur l’avait pratiqué auparavant, Shun préferera céder la royauté à un autre parangon de vertu,
plutôt qu’à sa propre couvée égocentrique:-)
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002_随人直渡西江水
À l’âge de 61 ans, le poète LiBai vint à JinLing. Le soir, il prit place devant la fenêtre, dans le clair de la lune automnale, tout en récitant et jouant le Qin. Sa voix constamment donna le change aux émois différentes – le reproche pour le désir, le sanglot pour la plainte – ce qui attira une belle jeune fille à lui. Le poète seul justement apprécia beaucoup la bonne compagnie, du coup il retint la goualeuse et ensemble, ils s’adonnèrent au patois de son pays d’origine :lui-même à l’avant du bateau rapide, les yeux engloutis dans les flots du vaste fleuve – ainsi le transport poétique avait mis une robe flamboyante – et tout comme l’être mythique – le poisson géant, qui devient l’oiseau du nom de Peng s’élance au-delà de toute l’orbe terrestre – il fut sans souci aucun. Cette fille vraiment figura une nuage rose, descendue sur lui ! LiBai lui pria de chanter dans l’air du royaume de Wu. Aussitôt, les fameuses chaussures de montagne lui vinrent à l’esprit, qui furent inventées par le poète Xie : avec leur aide, il serait bien en mesure de parcourir les paysages de long en large, avec cette fille, la main dans la main : mais combien ça fut chouette, dans son esprit ! Après, LiBai écrivit un poème pour conserver ce vécu :
De quelle bonne famille provient celle/ Derrière le rideau turquoise à l’est de JinLing/ Qui joue du Qin/ Qui m’a surpris – en passant\Comme une fleur tombée du ciel/ Elle suit son aimant, passant le fleuve qui vient de l’ouest : L’air de Chu chantonné/ Dans le patois de Wu, le danger certain se comprend toujours !\ C’est pour cela que le poète Xie/ Absolument en tenait à la compagnie/ De la chanteuse de la montagne orientale : Sans elle, le paysage restait muet !
003_谋董贼孟德献刀
DongZhuo fut un super-préfet qui avait le commandement sur une armée de 200.000 soldats. Lorsqu’une lutte pour le pouvoir à la cour se déroulait, le déloyal individu sans aucun scrupule saisit l’opportunité et occupa la capitale LuoYang.Il détrona le roi, installa un roi fantoche et effectua la prise du pouvoir en réservant la fonction du chancelier pour lui-même. Par la suite la capitale fut livrée au pillage. Bien que beaucoup de fonctionnaires loyaux s’engagèrent à faire destituer ce chancellier peu vertueux, DongZhuo s’imposât tout en nettoyant les rangs de cette même bureaucratie. Alors, il y avait un chevalier audacieux du nom de CaoCao qui voulait éliminer DongZhuo. Pour atteindre son but il devrait bien s’approcher du méfiant sujet, du coup il avait pris la tactique de lui rendre service avec beaucoup de zèle et circonspection à la fois. Finalement il obtint la confiance du dictateur et se déplacait librement autour de lui. Un jour, quand il entra la chancellerie, il avait caché un poignard précieux dans ses habits. En se dirigeant tout droit au petit cabinet, il vit DongZhuo assis sur son lit et son fils adoptif LüBu à son côté. « Pourquoi tu es en retard ? » lui demandaDongZhuo. « Les chevaux sont mauvais » s’excusa CaoCao. Lorsqu’il entendit cela, DongZhuo ordonna à LüBu de trouver un cheval plus vite et le dernier s’éloigna. CaoCao était bien résolu à exécuter son plan, mais il hésitait encore parce que DongZhuo était de nature très costaud. Le voici, station debout auprès du lit de son objectif ! Étant obèse, DongZhuo ne supportait pas être assis longuement, donc il s’allongea et se mis sur le côté. Finalement la situation se présentat favorable à CaoCao! Il s’empara du poignard mais sur le point d’exécuter le geste décisif, DongZhuo leva les yeux à la psyché dans lequel il l’entrevit et se retourna promptement. Au même moment où DongZhuo demanderait des explications à CaoCao, LüBu amena le cheval requis auprès du cabinet. CaoCao étant très intelligent vite s’avait agenouillé et présentait le poignard au bout de ses bras étendus proférant : « Aujourd’hui je suis venu ici pour faire cadeau à Votre Grâce de ce poignard précieux »! DongZhuo recouvra l’arme blanche que – présentant sept pierres précieuses incrustées dans le manche et le tranchant exquis – il trouva en effect extrêmement précieux. Il le rendit à LüBu avec le geste détaché de celui qui doit toujours avoir son entourage sous contrôle et CaoCao s’appliqua avec beaucoup de zèle à détacher la gaine qu’il donna à LüBu, lui aussi. DongZhuo se leva du lit et conduit CaoCao en dehors du cabinet pour examiner le cheval. CaoCao le remercia, demandant : « Je voudrais bien le mettre à l’essai » DongZhuo lui remis le harnais et CaoCao pris le cheval par la main, l’amenant à l’extérieur de la cour. Dans l’instant même il monta l’animal et pris la fuite – personne ne pouvant le rattraper.
004_周敦颐爱莲
Au début le philosophe célèbre Zhou Dunyi était un haut fonctionnaire à la cour. À la différence de beaucoup de ses collèges, il traitait tous les dossiers dont il avait la responsabilité de manière juste, sans se plier pour autant aux intérêts de gens puissants. Du coup il était bien aimé par le peuple. Une fois un prisonnier duquel le délit considérable par contre n’exigea point la peine de mort fut transféré à la compétence d’un haut fonctionnaire du nom de WangKui. Le dernier en tenait à supprimer à fond le délit en cause et absolument voulut le faire tuer : ainsi, le sort du prisonnier dépendit du « bourreau en qui la cour faisait confiance » comme le dit le texte et avec lequel personne n’osa disputer ! Selon la légende il se vit confronté par Zhou Dunyi qui venait justement d ‚assumer son poste ! Mais pendant que le dernier le confronta dans cette affaire, WangKui faisait la sourde oreille. Remonté, Zhou Dunyi tout d’un coup jeta cette fameuse tablette en ivoire par terre que tous les fonctionnaires subalternes devaient avoir sur soi pour montrer ou noter quelque chose lorsqu’ils comparaissaient devant leur supérieur. Il s’exclama : « En vue de votre comportement dans cette affaire – comment serait-il seulement possible d’envisager une personne comme la votre à la charge de cette fonction-ci? » Le philosophe futur voulant démissionner, WangKui n’eut que réviser le dossier en main. Plus tard, ZhouDunyi remplit le poste d’un haut juge dans la province de Guangdong. Il assuma pleinement tous ses responsabilités et ne s’épargnait pas dans l’exercise de sa fonction pénible : il supervisait les tribunaux correctionnels et partout où il intervenait en faveur de ceux qui furent punis à tort il redressa la justice. Vite il gagna la réputation d’un fonctionnaire incorruptible. Mais il se surmenagea et fut malade. Sur le tard il et se retira du monde politique habitant Lushan au pied du Mont Lotus. Aux alentours de ce domicile des étangs abondissaient et le paysage était d’une pureté prodigieuse. Spécifiquement c’était l’apparence du lotus qui attira son attention : chaque plante se dressant très haut au-dessus la surface claire des lacs, étalant ses feuilles spacieusement à plat sur l’eau et manifestant par sa station debout même une sorte d’allure hautaine et sûr de soi même. Zhou aimait beaucoup le caractère de cette fleur qui était issue de la boue sans se salir et qui était constamment lavée par les eaux sans en tirer aucun éclat en excès. Du coup il écrivit un poème très connu : « ailianshuo » et que tout le monde conçoit comme le symbole de l’intransigeance morale et le courage d’un intellectuel vis-à-vis de réels menaces :
Regardez : combien les eaux et la terre abondent/ des fleurs jolies toujours si proliférantes ! \ Durant la dynastie des Jin TaoYuanming/octroya à la chrysanthème son unique amour et à partir du roi Li des Tang tout le monde/aime ardemment la pivoine (suffruticosa). \ Moi par contre ce que j’aime uniquement c’est toute une allure fleurie : qui se lève au-dessus des intérêts en cause/sans se salir ni se vanter de son éclat qui à force de sa cohésion morale fait preuve de droiture/sans recouvrir le sol en léche-botte sans ramifier sa coterie.\ À cause de la fragrance des ses mérites/qui porte loin et remplit tout esprit noble chaque plante de cette espèce pure est visible de partout/sans se prêter aux futilités mondaines.
« Zhou Dunyi aime le lotus » cette anecdote désormais est généralement reçue comme édifiante. Par contre les phrases « sorti de la boue sans se salir » et « lavé par les eaux sans s’en enorgueillir » sont conçues comme exhortatives.
005_风尘三侠
Vers la fin de la dynastie des Sui (581-618) le roi Yang se livrait à toutes sortes de débauches, tout en mettant le pays à feu et percevant des impôts lourds. Son grand ministre YangSu de l’autre côté au lieu d’exercer une influence salutaire en tirait ses propres avantages en plus. Du coup l’état était devenu une véritable poudrière et les passions de chaque homme furent portées à l’ébullition. Alors il y avait un certain LiJing qui, tout en étant très ambitieux fut doué d’une intelligence exceptionnelle mais qui n’avait pas déjà obtenu la reconnaissance d’un souverain noble – à l’époque, c’était ainsi qu’on faisait carrière. Un jour , lorsqu’il se rendit à la résidence officielle de YangSu il fut interpelé d’une jeune femme. C’était une des chansonneuses qui étaient entretenues par l’homme puissant. Tout le monde l’appelait HongFu « flabellum rouge » parce que habituellement elle tenait un éventail de plumes rouge de ce nom en ses mains pour chasser les moustiques. (soit dit en passant que ce nom est homonymique à une expression qui veut dire « fortune inestimable » – les chinois toujours disposent d’une sensibilité extrème pour cette sorte de « hasard » phonétique, c’est presqu’une passion ) Il s’avait tout de suite fait remarquer par la jeune femme, qui lui demanda son nom et son adresse et qui, le lendemain frappa à sa porte. Elle vraiment avait de la volonté : s’étant aperçue du fait que la coterie de YangSu se défaissait de jour en jour et que le règne même des Sui touchait à sa fin, elle se décida fermement à se lier à quelqu’un d’autre qui disposerait du « right stuff » dans un monde instable : à un homme comme LiJing. De l’autre coté son esprit libre et son air résolu chez LiJing ne passaient pas inaperçus non plus : du coup Madame Zhang devint son épouse et le couple neuf pris ses cliques et ses claques dans les plus brefs délais s’en fuissant devant YangSu. Chemin faisant vers TaiYuan, lorsqu’un jour de bon matin Madame Zhang peignait ses cheveux, un homme apparaissa montant un âne. Avec ses favoris rouges frisés lui non plus aurait-il appartenu au genre commun. Il jeta un sac en cuir par terre en guise d’oreiller et s’allongea tout en regardant HongFu se coiffer. Quand LiJing parut sur scène qui venait d’étriller les chevaux, il s’emporta et voulut en venir aux mains avec l’inconnu. Mais elle le retint et même invita l’étranger au manger – tout en prenant de ses renseignements. Effectivement ils s’entendaient plutôt amicalement avec ce Zhang QiuRanKe. Quand celui-là apprit que LiShiMin (le futur roi des Tang) faisait les préparatifs pour renverser la dynastie des Sui, il pris rendez-vous avec LiJing à TaiYuan pour aller voir ensemble LiShiMin. Quelque jours après le rencontre prévu avec LiShiMin, QiuRanKe invita LiJing et HongFu à sa maison à Taiyuan. Il sortit tous ses bijoux et tout son argent disant : « Lors de notre rencontre avec LiShiMin, je me suis rendu compte du fait que lui, c’est bien le maître de tous les braves qui veulent améliorer les conditions de notre temps en cours. D’ici trois où cinq ans il sera bien l’empereur nouveau. En fait ces richesses-ci je les ai amoncellées pour m’établir une petite entreprise. Maintenant je sais que je dois quitter cette ville-ci, étant donné l’existence d’un homme comme LiShiMin qui veut établir sa grande entreprise. (En autre mots : on ne peut pas exclure que l’endroit ici sera ravagé par la suite et qu’ainsi tout mon capital sera perdu) Donc ces objets de valeur appartiennent à vous maintenant ! Certainement que vous aideriez LiShiMin à renverser les Sui ! Dans une dizaine d’années d’ici par contre, mille Li en direction du sud-est se situera l’endroit de ma propre réussite. Quand cette situation se présentera à vous, j’espère bien que vous aspergeriez du vin en me félicitant de mon succès ! » Après ces mots il partit. Par la suite, la dynastie des Tang sera établie et LiJing qui aura aidé l’empereur occupera le rang du chancellier. Une vingtaine d’années plus tard, un jour il y avait des nouvelles d’une flotte de mille navires et d’une armée de 100.000 hommes cuirassés dans le sud-est qui avaient concquis un royaume là-bas. Leur commandant par contre avait été couronné. Sachant bien qu’il s’agissait de QiuRanKe, LiJing et HongFu répandèrent du vin, bénissant ainsi cet entreprise dans le sud-est qui ne constituerait aucune menace pour leur propre Dynastie. On se souviendra toujours de ce rencontre gratuite de trois personnes qui, chacune d’entre elles courageusement investissant toute son existence pour une cause juste, sont nommées « les trois chevaliers de par un temps agité ».
006_文姬谒墓
Les grandes lignes de l’anecdote :
Le poète célèbre CaiYong, une vieille connaissance de CaoCao, avait péri dans la prison. Lorsque ce dernier en tant que plus haut fonctionnaire du roi vers l’an 207 apaisait les régions frontaliers du royaume déclinant, il envoya un émissaire auprès les huns pour négocier l’affranchissement de CaiYan, la fille du feu homme de lettres parce qu’il fut « affligé du fait que son ami n’a pas de postérité » Ce qui veut dire : qu’il n’a pas de fils : c’est toujours le fils – pas la fille – qui s’occupe des devoirs en matière de réligion ! L’envoyé l’affranchit de sa captivité et elle retourna dans son pays. Sur le chemin du retour CaiYan passa par le tombeau de son père et y récita son propre poème 胡笳十八拍 un poème épique de 1297 caractères – tout en jouant le Qin et dans lequel elle communique ses épreuves difficiles. Après elle se remaria à l’instigation de CaoCao pour une troisième fois : la première fois, elle est veuve après deux années ; la deuxième fois – à l’age de 18 ans (selon wikipedia) – elle est contrainte à un mariage chez les huns qui dure 12 ans dont sont issu(e?)s 2 enfants et qu’elle doit abandonner quand elle est « libérée » et peu après son nouveau mari encourut la peine de mort : au coeur de l’hiver les pieds nus, CaiYan s’invita à une réunion de hauts personnages et demanda pardon à CaoCao pour lui ! Gain de cause obtenu, elle fut demandée où se trouverait l’oeuvre de son père. Hélas, tout fut perdu dans les désordres de la guerre sauf qu’elle se remémorât encore les quelques 400 poèmes de son père ! CaoCao voulut lui envoyer un secrétaire mais elle refusa en alléguant qu’il ne serait pas approprié qu’elle se trouverait en proximité à un homme quelconque. Elle sut écrire elle-même par contre et l’oeuvre du poète célèbre sera édité. Un des tableaux dans le « couloir long » du « palais de l’été » qui n’est pas fourni dans le livre mais que l’on trouve sur les réseaux montre donc le moment où CaiYan arrive auprès du tombeau de son père en compagnie de deux servantes, une d’elles portant le Qin (attribut) qu’elle va jouer. C’est ça l’anecdote derrière le tableau : la fille prenant le relais du fils dans les devoirs réligieux envers les ancêtres ?
L‚anecdote se base sur l’existence d’une femme extraordinairement douée qui pendant toute sa vie aurait étée le jouet d’une économie mâle : de la guerre, de la politique, des devoirs religieuses, de la procréation – peut-être même de ce compte rendu que voici.. . Mais quelle anecdote plus adéquate pour indiquer une telle dure existence que la suivante fournie dans le livre : Une scène familiale datant de son enfance : une fois elle est ensemble avec son père, le savant-poète. Il est en train de jouer le Qin quand tout d’un coup une corde se déchire. Instantanément la petite fille lui indique la corde précise qui s’est déchirée. Au début le poète attribue le jugement de sa petite à un hasard heureux mais lorsque pour une seconde fois une autre corde se casse et qu’elle renouvelle l’exploit il se rend compte de son talent – et « à son sujet pousse un soupir profond » comme dit le texte. C‚est l’ironie de l’histoire qui pointerait du doigt la vraie anecdote : quand des années plus tard CaiYong aura appris la nouvelle de la mort de DongZhuo, dans les rangs duquel il avait assumé un poste plus elevé, il soupirera également : c’est ce geste qui sera retenu par WangYun qui lui en fera un procès qui le menera dans la prison où il mourira ! Donc c’est le soupir même qui est « derrière » le tableau et qui est le même soupir que CaiYan avait exprimé dans son poème auprès le tombeau de son père et qui aurait finalement assuré la postérité au dernier ! À la fin de son poème se trouvent ces quelques mots :
« Bien que le mètre atteint à son terme / l’écho continue à donner à réfléchir ; les différences infimes que les instruments de musique procurent sont bien fondées dans le cosmos / tout comme la tristesse et la joie communiquent au moyen de nos coeurs inséparés ; le fils et la mère habitent les pays des Hu et des Han respectivement et sont séparés l’un de l’autre / tout comme les cieux sont distincts de la terre ; la plainte de ma dure vie que voici déborde le ciel / comment est-ce que même le plus grand royaume pourrait la contenir ? »
Du coup c’est par le moyen de ce soupir (artisanale, idéelle, poétique) qui « déborde » le ciel (matériel, nuageux) qu’elle fait écho au soupir fatidique de son père et de cette façon inscrit l’évènement biographique auprès la mémoire des ancêtres et ainsi répare le manque en matière réligieuse ! Soit dit en passant que le statut d’auteur de ce poème à elle lui est contesté : là-bas, en Chine il y aurait de la théologie, aussi ?
007_文人三才
Par l’expression des « trois hommes de lettres talentueux » en Chine on entend le petit cercle d’amis se composant de SuDongPo (1037-1101) et de ses contemporains QinGuan et FoYin. Tous les trois – notamment SuDongpo – étaient des hommes de lettre connus et à leur sujet il y a beaucoup d’anecdotes – particulièrement en ce qui concerne leurs rencontres bien arrosées. Particulièrement celle concernant SuDongpo et QinGuan s’efforçant de faire boire FoYin jusqu’à l’ivresse devrait être digne d‘ explicitation – intentionnellement enivrer quelqu’un n’est pas un acte amical en soi, après tout ! Originellement le nom de FoYin fut XieRuiqing. Ayant lu depuis son enfance, connaisssant les écrits du confucianisme et tous les classiques et la littérature contemporaine en plus, il était venu à la capitale pour participer aux examens impériaux pour faire carrière. SuDongpo qui avait entendu de son talent se lia d’amitié avec lui et dorénavant ils se rencontraient souvent, faisant de la poésie, discutant, buvant. Une année de sécheresse pesait sur l’état et l’empereur fit élever un autel pour prier le ciel. Il ordonna à SuDongpo de composer le texte officiel, pour ainsi dire, qui serait proféré pour demander de la pluie et aussi d’acter en tant que maître de la cérémonie de jeûne. Quand XieRuiqing entendit cette nouvelle, la chance de jeter un coup d’oeil sur l’empereur le travaillait et il sauta sur l’occasion et se fit emmener à la cérémonie par son ami. SuDongpo l’affubla d’une « Kasaya » – l’habit en lambeaux d’étoffe que portaient les moines et l’amena au temple en tant que bonne à tout faire : planter les bâtonnets d’encens, rabattre la mèche aux bougies, remettre de l’huile dans les lampes, arranger l’offrande etc. L’empereur arriva. La cérémonie de jeûne finie, SuDongpo ordonna à un moine secondaire d’apporter le thé : ce moine justement fut XieRuiqing ! C’est parce que son ami s’activerait sur toute l’étendue du temple et que la foule de gens l’empêcherait de voir nettement l’empereur que SuDongpo l’avait en plus destiné à la fonction d’offrir le thé et c’est ainsi que XieRuiqing se vit tout d’un coup bousculé « auprès les genoux impérieux ». Il y eut un moment de contact visuel. Ce qui n’est pas anodin parce que le regard direct représente une effraction de la « sphère auratique » (selon Bazon Brock) qui tient place de la couronne, représentant le pouvoir même. L’empereur ShenZong constata l’apparence de Xie qui cocha toutes les cases d’un certain genre esthétique définies dans la littérature et qu’il se distinguait beaucoup des autres moines. Il lui demanda sa provenance et depuis longtemps qu’il eût déjà servi dans le temple. Pris au dépourvu (l’empereur s’adressant à un valet! Mais par cet acte même l’empereur effectivement sanctionne a posteriori l’infraction précédente du regard directe: ce serait toute l’existence de XieRuiqing qui se joue dans ce moment !) Xie lui donna les informations et tout simplement dit qu’il vint d’arriver dans le temple « pour être moine » de justesse. Ce qui relève du vrai : 1. conformément à la vérité il vient justement d’arriver ; 2. la tournure « se détourner des devoirs familiaux » dénote correctement sa fonction dans le temple – tout en signifiant également : « devenir religieux ou religieuse » Zut ! Et ajouta qu’il serait « renversé par le bonheur d’avoir entrevu le « visage du ciel » et qu’il vraiment n’arriverait pas à « maîtriser sa joie ineffable. » tournures requises ShenZong se réjouit d’une réponse tellement consciente et astucieuse à la même fois et continua à demander : « Tu t’y connais avec les classiques, hein ? » Xie par contre préfera éviter mentionner les classiques qui comprennent des sujets plus séculiers comme la politique, l’histoire etc. et qui auraient jeté un doute dangéreux sur sa vocation témoignée. Du coup il répondit qu’il aurait une connaissance profonde des écrits bouddhistes qu’il les aurait lus depuis son enfance. Alors l’empereur purement et simplement lui octroya son nom de prêtre bouddhiste : « celui qui va jusqu’au fond » « Liaoyuan » « des lois immuables décidés par Buddha » « FoYin » et le fit raser les cheveux sur-le-champ en signe de son statut nouveau ! (En effet le nom même constitue un syntagme : énoncé par l’empereur il ordonne à Xie de n’en s’occuper dans l’avenir que du bouddhisme ! Il avait certainement deviné l’intention vraie derrière la comédie mais ne voulut pas gâcher la cérémonie politiquement si importante en condamnant Xie à la peine de mort, encourue parce que le dernier lui avait menti ) Dans la suite Xie s’adonnait avec beaucoup de zèle à l’étude des écrits bouddhistes. Peu à peu son dessein primaire de percer dans le monde fut remplacée par la poursuite sérieuse du but suprème de sa religion, c.à.d. de s’en départir de toute intentionnalité et atteindre à la sérénité. SuDongpo de l’autre côté se reprochait beaucoup d’avoir mis son ami dans la situation difficile en premier lieu et chaque fois qu’il rencontrait Xie, il n’avalerait pas du tout l’attitude impassible de son ami d’antan avec lequel il s’avait tant régalé des mondanités. Du coup il lui lancerait des pointes pour le faire sortir de sa réserve : mais son ami ne bougea pas ! Un de ses poèmes ayant touché à la politique, un beau jour SuDongPo se vit dégradé et il atterrit dans la province. C’est seulement quelques années plus tard qu’il revit son ami qui avait gardé cet espèce d’expression calme d’ailleurs. SuDongpo finalement voulut en avoir le coeur net et avec son ami QinGuan il organisa une fête dans un jardin avec de la musique présentée par de jolies femmes et ensemble ils complotèrent d’enivrer leur ami et ainsi de l’aider – lui qui se mettrait des bâtons dans les roues – à retrouver le chemin de la vie matérielle toujours si belle. C’est après que FoYin aurait résisté à toutes ces tentations que finalement sa sincérité était apparent à tous et qu’ils poursuivraient leur amitié célèbre !
008_穆桂英招亲
La scène suivante provient d’un roman historique datant de la dynastie des Ming . Pour écraser la position militaire des Liao, un guerrier des Song du nom de YangZongbao avait pour tâche de s’emparer du « bois qui soumet le dragon » – un arbre légendaire qui était défendu par la forteresse de MuKe. Dans la bataille suivante il fut vaincu par la fille du commandant de la forteresse – ce qui ne le conduisit seulement en prison mais aussi chez lui eut pour conséquence un état d’abattement profond. Qui aurait pu le penser : cette même jeune femme du nom de MuGuiying fut très éprise de lui ! Lorsqu’elle apprit que le général MuGua (homophone de « tête de bois ») non seulement avait mis ce spécimen au cachot mais l’avait ligoté en plus elle le gronda : ayant servi leur pays pendant si longtemps ensemble, lui son frère en armes toujours n’arriva pas à deviner son affaire de coeur ! Mais cette fois-ci son camarade de régiment lui servirait comme envoyé d’amour et arrangerait la conclusion du mariage avec le prisonnier ! Démarche à faire qu‘ en Chine d’antan incombait aux parents de faire – c’est peut-être cela qu’aurait ajouté au succès de ce roman ? Mais YangZongbao refusa obstinément à toute tentative de rapprochement et MuGua jeta l’éponge : maintenant MuGuiyin en personne dut passer à l’action. Sans prendre en considération toutes les manifestations d’héroïsme de la part de son prisonnnier qui voulut plutôt mourir que de se rendre à l’ennemi et aux intonations tendres d’une fille timide elle lui proposa de lui fournir l’arbre convoité s’il donnait son accord au mariage. En plus elle assura de vouloir amener toute sa tribu au service du monarque de YangZongbao : en fin de compte, son refus volontaire qui l’engagerait dans une voie sans issue fut en vain ! Yang objecta qu’il serait tout à son honneur s’il mourait pour sa patrie. Mais sa faible riposte fut contré par la logique implacable : L’honneur qui s’ensuivrait d’une mort sur un champ de bataille importante serait plus estimable que celle dans les enceintes d’une forteresse secondaire. En plus si son souvereign ne disposait pas de l’arbre légendaire il ne pourrait pas vaincre l’ennemi qui, après avoir pris d’assaut les sites stratégiques en question envahirait la plaine densement peuplée, commettrait ses forfaits sans obstacle : de ce point de vue Yang n’aurait satisfait à ses devoirs envers sa patrie non plus. Finalement la renommée de sa famille qu’avait établie toute une lignée ancestrale tomberait à l’eau sans parler de son honneur individuel ! Ainsi le coeur ému du guerrier acharné finalement fut apaisé par un propos clair et net ! Inutile de relater ici que l’acceptation de la supériorité de son adversaire ravissante et dans la bataille physique et dans la discussion logique pour notre héros se transmuerait en amour sincère etc. ?
L’intelligence artificielle par contre n’en finira jamais de transformer des arguments dites « acceptables » en quolibet isotrope dit « véridique » – jusqu’à ce que le consommateur auprès de l’interface ubiquitaire n’aura plus conservé aucun grain d’amour afin que le sable dans ses rouages entropiques ait disparu : Hello, Brave New World !
009_伯牙摔琴谢知音
Pendant l’ère du « printemps et l’automne » « chunqiu » 770 – 476 avant J.-C. il y avait un fameux musicien du nom de BoYa qui non seulement était un virtuose du Qin mais surpassait en cette matière tout ce qu’on aurait cru possible jusque-là. Seule ombre au tableau : personne autre que lui n’était à la hauteur de son art qu’il exerçait en conséquence dans un véritable isolement spirituel. Un jour après une promenade en bateau il fit escale à l’embouchure d’un fleuve. C’était justement la fête du mi-automne et la pleine lune recouvrit le paysage de sa lumière argenté. Ne pouvant se retenir BoYa sortit son instrument de musique et commença à jouer à coeur joie. N’ayant pas encore terminé la première morceau de musique que soudain une corde se cassa ce qui fit tressauter le musicien. Après tout, ce Qin n’était pas un instrument de musique quelconque mais un véritable Stradivarius doué d’un charme magique certain ! Pour notre protagoniste du premier millénaire avant Jésus-Christ il pouvait certainement prévoir l’avenir : une corde cassé correspondant à toutes sortes d’impondérabilités ! Donc BoYa envoya ses valets sonder la berge et en effet ils dénichèrent un bûcheron qui s’avait mis à l’abri de la pluie ! Celui-ci confessa d’avoir entendu les sons extrêmement mélodieux du qin qui l’auraient enthousiasmé. Surpris par le fait qu’un homme simple comme celui-ci fut capable de saisir de la musique BoYa l’invita à bord. Bien que ce bûcheron qui s’appelait ZhongZiqi vécût dans la pauvreté avec son père, il avait de l’ambition et tenait à étudier les classiques tous les soirs. Du coup il se montra parfaitement capable de s’entretenir sur tous les thèmes pertinents et s’entendit super avec le musicien illustre. Le dernier finit par sortir le qin et commença à jouer. En matière de chaque morceau ZhongZiqi connut le fond littéraire, il sut de quelle région provenait l’air et pour finir, il interpréta à merveille le style choisi par le virtuose et indiqua précisément où en était l’état d’âme du virtuose : « Lorsqu’on se trouvait au sommet du monde entier, il proféra « haut, haut.. » (« wei, wei »), quand on songeait au temps qui passe, il dit « shangshang » pour désigner l’eau qui coule. » comme est dit dans la littérature. Vite ils se considèrent comme frères du même sang et au lever du jour il se séparèrent à contrecoeur, non sans prendre rendez-vous à l’année prochaine au même endroit. Au même jour du mi-automne suivant BoYa s’était rendu sur place – mais aucune trace de ZhongZiqi ! Pendant quelques jours il jouait le qin et l’air se remplissait des sons tristes et austères. Puis il se mit en route pour rechercher son ami intime. Chemin faisant il rencontra un vieillard : c’était le père de ZhongZiqi. Il l’informa que le dernier était décédé à la suite d’un surmenage certain après qu’il eut redoublé d’ardeur à l’étude depuis leur rencontre. Avant de mourir il avait enjoint la famille de l’enterrer sur la berge même où il avait fait la connaissance de BoYa espérant que son âme se rendrait au rendez-vous prévu. Devant le tombeau, BoYa sortit le qin et joua de tout son coeur et tout en pleurant quand inopinément la foule de badauds qui s’avait attroupé autour de lui commença à rire et à lui applaudir. Le consterné apprit du père que les gens de cette contrée n’y comprendraient rien de la musique et qu’ils supposeraient que les sons d’un instrument de musique soient cause de joie pur et simple. Alors BoYa abandonna tout espoir et déchira toutes les cordes. Puis il écrasa l’objet précieux sur une roche et dit (selon le livret) : Si l’on destruit la fragile apparence belle de l’instrument – son bois supportant sera démuni\ Hélas, Ziqi – à quoi bon jouer le qin ?/ De l’expression posée des visages toujours si circonspects\ Ne sortira jamais le regard de celui qui écoute ! Donc l’expression « zhiyin » désormais en chinois à la lettre signifie « connaître la musique » et au figuré connote « l’ami intime ».
010_云梦公主
L’anecdote suivante a été conçue par PuSongling (1640-1715) dans l’oeuvre de sa vie d’un précepteur simple.
Il était une fois un garçon extrêmement doué qui savait parler dès sa naissance : bien sûr que ses parents veillaient sur leur trésor et espéraient qu’il ferait fortune ! Il le nommèrent « AnDaye » ce qui signifie : « Établir une grande entreprise ». Quand il arrivait à l’âge adulte, le jeune homme beau et sage fatalement commença à faire l’objet d’innombrables projets de mariage de la part des voisins. Mais sa mère qui avait fait un rêve dans lequel un ange lui dit que son fils ne devrait marier personne d’autre qu‘ une princesse s’obstina à refuser toutes ces sollicitations dans l’attente d’apparition de cette déesse. C’est après bon nombre d’années et que la dernière n’aura pas paru qu’elle regrettra beaucoup son parti pris ! Un jour – Daye comme d’habitude étudiant les classiques et se trouvant seul dans la maison – qu’il sentit subitement une senteur tout-à-fait remarquable : lorsqu’il leva la tête il vit une belle servante qui débarqua dans la pièce annonçant l’arrivé de la princesse ! Avant qu’il n’ait été sorti de son incompréhension, il distingua quelque quatre ou cinq soubrettes qui accompagnèrent une jeune femme gracieuse (ce moment correspondrait à peu près à la rencontre de Marcel et Albertine – la dernière se trouvant dans la « petite bande » sur la plage de Balbec 🙂 dans sa chambre qui tout-à-coup fut remplie de fragrances épatantes et de lueurs éblouissantes. Daye s’inclina devant la beauté et demanda avec beaucoup de révérence quel être céleste daignerait rendre visite à son demeure humble. L’adressée sourit tout en se taisant et cachant sa bouche derrière les manches longues de sa robe. Une de ses accompagnatrices répondit qu’il s’agirait de la princesse des rêves, originaire de la cour de la sainte impératrice ! Le moment de silence se produisit dans lequel de par tout le temps le nouveau couple humain s’aura tout dit . Daye aimait beaucoup jouer aux échecs, du coup une des bonnes accompagnantes trouva à la disposition la table d’échiquier qu’elle eut vite apportée : il la défia ! La princesse, avant qu’elle ne se soit assise ordonna à une soubrette de s’allonger sous la table afin qu’elle puisse reposer ses pieds sur son dos – cet épisode devrait avoir prouvé à Daye qu’il s’agissait d’une vraie princesse parce que tous les lettrés savaient bien que la fameuse YangGuifei la maîtresse du roi des Tang avait eu l’habitude de poser ses pieds sur l’eunuque GaoLishi qui de temps en temps l’eût appelé de par dessous la table pour obtenir la permission de s’étirer un peu. Par la suite le jeu évolua pour Daye dans un sens tout-à-fait imprévu : habituellement c’était lui qui gagnerait, mais cette fois-ci son adversaire sublime se montra parfaitement à son hauteur et même le vainquit ! Après le jeu et avant de partir elle lui confia une somme d’argent de mille Liang en or et lui donna des instructions pour qu’il construisisse une maison – après quoi elle reviendrait. Le soir même de ce retour il demanda son main. La princesse consentit à deux conditions près : s’ils consommaient le mariage, elle resterait à ses côtes pendant six années seulement ; s’ils en restaient à être de bons amis, elle l’accompagnerait pendant des décennies à venir. Un beau jour, six années plus tard et que Daye eut deux garçons et que la princesse l’avait quitté sans mot dire. Il ne se remarierait pas.
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{Texte-source: 全本新注聊斋志异].蒲松龄.文字版\ 朱其铠, 1992}
011_画壁
Ensemble, MengLongtan et le gradué Zhu séjournaient à la capitale. Un jour ils flanaient dans les rues quand inopinément ils se repèrent dans un temple très mince où résidait un seul moine qui les invita à faire un tour dans l’esprit décontracté. Bien sûr que cet occurrence du mot « décontracté » (随喜) a deux significations : l’autre signifiant « faire un don ». Comme je l’ai déjà dit dans l’introduction à mon balado : je ne me propose point d’étudier à fond le texte-source ; ce que je fais ici c’est plutôt sanctionner – et de façon autonome sans recours à une IA ! – un contexte dans lequel le lecteur\la lectrice peut retrouver de la moralité pratique dans une anecdote provenant d’une économie culturelle toute autre. Chose banale semblerait-t-il : mais au lever du jour électromagnétique d’une intelligence artificielle il y a encore l’interstice historique de ce coucher du soleil logocentrique qui nous a de par tous les temps fourni le moyen nécessaire pour librement exprimer toutes nos intentions (et qui à l’heure actuelle ne sont pas encore enregistrables de manière « ubiquitaire » ! ) La somme de cette intentionnalité intime, on pourrait bien la nommer : « âme »? Ne me comprenez pas de travers : je ne m’intéresse pas du tout à la théologie – mais il faut tenir en considération l’éventualité que les esprits sans éducation ni moyen critique seront de plus en plus en proie – auprès de l’interface numérique – à un certain « nudging » « opaque » en cette matière ! Les générations à venir ont droit à leurs erreurs à eux-mêmes certes, mais il semblerait qu’un certain pont herméneutique leur sera bien utile pour encore mieux accomplir ces voeux ancestraux qui sont des plus cordiaux et bienveillant – et non pas seulement ceux qui sont de nature métaphysique et mènent souvent à la vengeance ..! Bien sûr aussi que le lecteur\la lectrice francophone aura à « faire avec » mes compétences fautives en matière de la langue française. De l’autre côté je pourrais bel et bien faire passer mon texte à un « correcteur automatique » pour fournir un texte lisse – mais je renonce volontairement à cette tentation ! Si vous vous heurteriez à cette « arête » (terme de R.Barthes) logique par ailleurs, tant pis pour votre francophonie : le « output » isotrope de l’IA ne sauvera pas aucune culture réfractaire aux recommandations entropiques d’une « good governance » numérique à venir : ça, c’est sûr ! (Ici, je jure les dieux que je vais relire les quelques passages dans la grammaire française qui me semblent être les plus brûlants dans mon cas – notamment concernant les accords, le subjonctif dans les propositions subordonnées, la conjugaison etc. – et dans les plus brefs délais, aussi:-) Dans le sanctuaire il y avait la statue du moine excentrique BaoZhi et l’imagerie sur les deux murs était d’un éclat surprenante ! Surtout la représentation d’une petite bande de fées qui parsemaient des fleurs brillait de vivacité. Une d’entre ces filles aux cheveux longs qui tenait une fleur entre ses doigts semblait même être sur le point d’articuler un mot ! Son regard changeant attira toute l’attention de Zhu qui se permit d’être entraîné dans la scène jusqu’à ce qu’il avait l’impression d’y retrouver son propre corps ! Soudainement il voyait un palais beaucoup plus somptueux qu’il n’y en avait dans le monde réel ! Là-bas un vieux maître était assis et autour de lui s’avait rassemblé une foule de jeunes moines qui avaient mis à nu leur épaule droite. Zhu se mêla à eux. Tout d’un coup il avait l’impression que quelqu’un lui tira par la manche : c’était la fée ! Elle s’en alla en souriant. Zhu la suivit le long des couloirs jusqu’à ce qu’elle entra une petite cabane. Il hésita mais lorsque la femme se retourna en sa direction levant la fleur dans ses mains et au loin fit un geste engageant, il finit par entrer. Quand il vit qu’il n’y avait personne autre qu’eux deux, il l’embrassa sans qu’elle aurait fait trop d’obstacle à lui et passa à l’acte sexuel. Au bout d’un moment elle le quitta, fermant la porte derrière elle. Avant de partir elle l’avertit d’être silencieux, même pas oser tousser ! Le soir elle revint et ils passèrent deux journées comme ça ensemble. Quand ses consoeurs s’aperçurent de ce qu’il y avait anguille sous roche, elles le débusquèrent. Elles chinèrent leur camarade : « T’es déjà tombée enceinte, pourquoi est-ce que tu continues à jouer la vierge ? » Elles la poussèrent à porter le serre-tête comme signe de son statut nouveau. Elle se montra embarrassée par contre et ne voulait pas s’y résigner jusqu’à ce qu’une de ses soeurs fit remarquer à sa troupe qu’il serait opportun de les quitter maintenant pour éviter une attention peu souhaitable de la part d’autrui. Tout en riant elles s’en allèrent. Lorsque Zhu regarda la fille se coiffer le chignon qu’elle fixa par l’épingle de phénix, il la trouva encore plus séduisante qu’auparavant. Il jeta un coup d’oeil autour de lui mais il était seul et plus il se livra à des intimités avec elle plus l’atmosphère autour d’elle lui semblait imbibé des parfums que se mettaient les femmes mariées. Ils étaient justement en train de se donner à l’autre corps et âme que tout d’un coup du dehors ils entendirent le bruit de lourdes bottes en cuir et un cliquetis métallique ! Il y avait des gens qui parlaient ! La fille bondit du lit et par une fente les deux guettèrent le laquais qui portait la cuirasse. Son visage était sombre et il avait une chaîne à la main et une hallebarde sur lui. Les filles l’entouraient. « Êtes-vous au complet ? » leur demandait le cuirassé. « Oui ! » répondit la bande. « S’il y a un mortel qui se cache ici il faut bien le livrer tout de suite, autrement vous aurez affaire à moi ! » les mit-il en garde. « Il n’y a personne ! » lui dirent les filles. Quand le valet fit mine d’effectuer une perquisition des lieux, la fille apeurée exhorta Zhu à se cacher sous le lit tandis qu’elle ouvrit une petite fenêtre pour s’échapper. À plat ventre Zhu ne se risquait même pas à respirer. Il entendit les bottes entrer la petite demeure, puis d’en sortir. Après un petit moment le bruit de voix s’éloigna mais il y avait encore des allées et venues continuelles, donc il n’arriva pas à se décider de quitter sa cache. Il y resta coincé jusqu’à ce qu’il avait le chant des cigales dans l’oreille et qu’il en vit trente-six chandelles : il en arriva à ce qu’il ne sût même plus d’où il était venu ! À ce moment MengLongtan qui voulait visiter le temple remarqua l’absence de Zhu. Il demanda où se trouverait son compagnon de voyage. « Il est parti prendre des leçons en matière de la loi de Buddha » lui dit le moine souriant. « Où ? » « Non loin d’ici !» De ses doigts il toqua au mur : « Pourquoi est-ce que monsieur le bienfaiteur Zhu s’attarde-t-il ? » Immédiatement on vit le contour de Zhu se dessiner parmi les images sur le mur et qui était comme figé dans la posture d’une écoute attentive. « Son compagnon de voyage attend depuis un bon moment déjà ! » insista le moine. Dès que Zhu se mit en mouvement une illusion optique se produisit comme s’il sortirait de la scène même et descendrait d’en haut du mur. Mais l’homme qui rejoignit les deux avec son visage pâle, ses yeux écarquillés et ses jambes tremblantes épouvanta beaucoup MengLongtan ! « Je viens de rester allongé sous un lit lorsque j’endentis quelqu’un frapper à la porte aux coups de tonnerre et puis je suis sorti du cabane aller voir » dit son compagnon. Ensemble ils tournèrent leurs yeux vers la fée qui tenait la fleur en sa main : ses cheveux longs étaient relevés en chignon ! Paniqué Zhu demanda une explication au moine. Le dernier lui dit, souriant : « Chaque humain se produit ses illusions à lui même – comment pourrais-je expliquer ça, simple moine que je suis ? » Zhu et Meng quittèrent le temple, l’un affligé, l’autre inquiet.
012_偷桃
C’était pendant le commencement du printemps (selon le calendrier lunaire) quand, dans ma jeunesse, je séjournais en capitale de province pour y participer aux examens préparatoires. Le jour férié venu un ami m’entraîna avec lui pour nous distraire dans la ville festive et regarder toutes les décorations opieuses. Tout le monde semblait debout portant ses pas vers la magistrature pour fêter : on appellait ça « les jeux printaniers ». Les quatre plus hauts fonctionnaires de la province s’y trouvaient assis par deux, répartis sur les deux côtés de l’est et l’ouest de la grande salle. Étant encore bien jeune, à l’époque, et ne sachant pas discerner les rangs de ces autorités j’étais tout impressionné par le vacarme de la foule et le bruit des gongs. Soudainement un homme qui menait un jeune garçon avec lui et qui avait son fardeau sur lui se présenta aux dignitaires. Il me semble qu’ils échangèrent des propos mais le peuple autour de moi était trop bruyant pour pouvoir les entendre. Je vis seulement que les gens dans la grande salle riaient. Alors il y apparaîtra quelqu’un en habit qui ordonna à voix haute de représenter la pièce ! Observant l’ordre l’agenouillé se leva. « Jouer quelle pièce ? » demanda-t-il. Les fonctionnaires délibérèrent et lui firent demander sa spécialité par un officier subalterne. « On peut produire les fruits de la terre de par toutes les saisons !» déclara l’homme et le subalterne transmit sa réponse aux autorités dans la salle. Après un instant il ressortit ordonnant, précisément, de produire une pêche. (Une fruit de l’automne : ndlr – peut-être nécessaire en vue du fait que les lecteurs\lectrices d’aujourd’hui sont accoutumé\e\s à s’acheter toutes les fruits de par tous les temps. La gageure certainement implique une critique envers le gouvernement : les impôts devraient être au niveau de la récolte – tandis que les anciens régimes (en Chine) souvent pressuraient les paysans) L’artiste accepta. Il enleva son manteau et le mit sur sa caisse de bambou tout en ayant une mine larmoyante. « Votre honorable juge vraiment est trop implacable ! Dans les fleuves les blocs de glace ne sont même pas encore fondus : où est-ce que je trouverais une pêche ? Mais si je ne trouve pas une pêche il est à craindre que le supérieur (« supérieur » littéralement : « celui qui est assis dans le nord et qui regarde vers le sud » = l’empéreur. En autres mots, il s’agit soit de l’idiome stéréotypique pour désigner les fonctionnaires sur place soit d’une indication politique qui pointe du doigt la constitution de l’état. En fait, on remarquera une lame de fond critiqueuse tout au long de cette nouvelle) ne se fâche ! Que faire ! » Son fils dit : « Mon père a déjà consenti, comment est-ce que vous pourriez décliner maintenant ? » L’artiste hésitait pendant un bon moment, puis il dit : « Je me creuse les méninges mais aux prémices du printemps le sol terrestre est partout couvert de neige ! Seulement la Grande Mère qui est aux cieux dispose d’un jardin où les fruits ne flétrissent jamais – peut-être qu’elle en a encore ! De toute manière faut-il voler la pêche au ciel !» Son fils objecta : « Après tout, est-ce qu’il y a une échelle pour monter au ciel ? » « Il y a une méthode ! » affirma son père. Il retira un rouleau de sa caisse : une corde d’une trentaine de mètres en longueur dont il prépara les bouts. Puis il lança la corde en l’air qui resta raide comme elle était suspendue à quelque chose. Ce qui de loin se présenta comme un câble devrait être une gaine pour des bâtons de bambou ? Puis il la haussa à plusieurs jets jusqu’à ce qu’elle fut complètement déroulée et que son bout n’était que très flou à repérer parmi les nuages. Il appela son fils : « Viens ici ! Moi, je suis déjà un vieux lourdaud – donc il faut que tu y ailles ! » Il lui passa la corde. « Tiens-la fermement ! Vas-y, tu peux monter ! » Le garçon fit grise mine : « Le vieux est vraiment trop désorienté : il me demande de monter jusqu’à l’altitude incommensurable des cieux au moyen de ce fil-ci ! Si la corde se cassait au milieu de la route je me casserait la gueule en plus ! » Son père lui tapa sur l’épaule en guise d’encouragement : « J’ai déjà donné ma parole d’honneur : le remords ne peut rien y changer ! Maintenant il faut absolument que tu y ailles! Ne t’affliges pas : si tu parviens à voler la pêche, on sera certainement récompensé d’un sacré paquet ce qui nous permettra de te trouver une jolie épouse ! » Le garçon prit la câble et commença à grimper en faisant cercle et en glissant le long du fil avec ses mains et pieds comme une araignée. Doucement il s’enfonça dans les nuages jusqu’à ce qu’il ne fut plus visible. ( Ses mouvements grimpants très amples graduellement s’auraient transformés en manoeuvres nécessaires pour intercaler successivement des pans d’étoffe colorées entre lui-même et le point de vue des spectateurs – pour pouvoir filer dans une fenêtre au troisième étage, je suppose:-) Après un long moment une pêche tomba du ciel, grand comme un bol à riz ! Se réjouissant l’artiste la remit aux dignitaires. La fruit passa de mains en mains des fonctionnaires (qui, cette fois-ci, eussent une scène de théâtre à eux-mêmes à jouer 🙂 qui l’examinèrent avec un air méfiant. Mais, tout d’un coup la câble retomba ! Affolé, l’artiste dit : « Quel malheur ! En haut quelqu’un a coupé la corde dont mon fils dépend ! » Peu de temps après autre chose chut : c’était la tête de son fils ! L’artiste la tenait dans ses mains, sanglotant : « En train de voler la pêche, mon fils s’est certainement fait pincé par le gardien du jardin ! Il est mort ! » Encore un instant après un pied tomba et puis se succédèrent tous les membres restants. Plongé en deuil, l’artiste les ramassa et les mit dans la caisse qu’il finit par refermer. « Vieillard que je suis, je n’ai qu’un seul fils qui m’accompagne tous les jours sur mon chemin ! » proclama-t-il. « Aujourd’hui, en agissant sur l’ordre du supérieur (encore une amphibologie : 严 désignant le propre père et les représentants du pouvoir d’état au niveau provincial) on a eu cet accident ! Il me reste d’emporter mon fils et le mettre en terre ! » Puis il entra dans (monta sur la dalle élevée de) la Grande Salle et s’agenouilla, disant : « À cause de cette affaire mon fils est mort ! Si vous me preniez en pitié et apportiez votre contribution aux frais de l’enterrement je vous témoignerais ma reconnaissance – à jamais ! » Visiblement agités (agités – soit à cause de la mort du garçon, soit à cause d’une critique amère du pouvoir dont l’expression quasiment palpable sur le plan public n’est sanctionnée qu’à l’occasion de la fête) et sans exception les fonctionnaires remirent de l’argent à l’artiste qu’il mit dans une poche à la ceinture. Puis il tapa sur la caisse, appelant : « Fais vite, Baba ! Sors de là-dedans et te remercie pour la gratification ! » Soudainement une tête aux cheveux hérissés apparut qui souleva le couvercle : c’était son fils qui se mit à plat ventre devant le nord de la salle ! C’est à cause de son habilité hors pair que je me le remémore jusqu’à aujourd’hui. Après, j’ai appris que la société secrète du lotus avait pratiqué cet art auparavant ; je me demande s’il aurait possiblement été leur disciple.. ?
013_狐嫁女
Dès sa jeunesse, le modeste fonctionnaire Durant la dynastie des Ming un 尚书 était un poste plutôt haut? YinShidan avait été de nature courageuse et futée, déjà ! Il habitait alors une préfecture où il y avait un manoir spacieux avec plusieurs bâtiments annexes. Mais le lieu était hanté, du coup la propriété était abandonnée et couverte de broussailles : même pendant la journée personne n’osait pas y entrer ! Une fois il participa à une soûlerie lorsqu’un compagnon proposa : « À chacun qui ose passer la nuit dans cette villa : invitons-le à un repas copieux ! » YinShidan qui était impécunieux sauta sur cette occasion : « Je n’y vois pas d’inconvénient ! » proclama-il et se mit à enrouler la natte sur laquelle il était assis. Les autres le taquinèrent : « Pour l’instant on va rester présent – quand un spectre se manifestera tu n’as qu’à appeler au secours ! » « S’il y a des revenants ou fantômes je vais les attraper en guise de pièces à conviction! » ria-t-il. Puis il entra le domaine déserté où les sentiers étaient envahis par des herbes hautes et drues. Il faisait nuit déja mais grâce au croissant de lune il pouvait repérer les portes et fenêtres et tâtonnant à travers plusieurs cours intérieurs il finit par accéder au bâtiment central. Quand il monta à la plateforme Dédiée à l’appréciation de la lune il y trouva le clair de lune d’une pureté exquise et s’installa. Le croissant passé derrière les montagnes dans l’ouest illuminant une crête bien distincte, ça fut un bon moment déjà depuis qu’YinShidan était là sans rien remarquer d’étrange. Secrètement il se moqua des bruits qui couraient, s’allongea et reposa sa tête sur une pierre, contemplant la constellation du cow-boy et la tisserande. =Altair et Wega. Le mythe pointe du doigt les dessous du mariage ci-après : une aggression sexuelle.. . La première période de la nuit La nuit était sectionnée en 5 更 – chaque « geng » mesurant 2 heures touchant à sa fin, il entendit en demi-sommeil le bruit des pas qui montèrent à la plateforme. Il fit semblant de dormir et guetta un serviteur qui portait un lampion de lotos. Symbole de chasteté Quand il vit YinShidan il recula et adressa la parole à quelqu’un en derrière : « Il y a un étranger ! » dit-il. L’autre demanda : « Qui est-ce que c’est ? » « Je ne le connais pas ! » Ici se joue la différence entre les mots « étranger » et « inconnu ». Du coup : ce qui importe au serviteur en premier lieu c’est que YinShidan est étranger à leur intention non publique Un instant après un vieillard apparut qui inspecta de près le visage d’YinShidan. Il dit : « C’est le fonctionnaire Yin : il dort fermement. Occuperons-nous de notre affaire : ce noble a l’esprit large et n’y verrait certainement pas d’objection » Puis il mena la troupe dans la maison où toutes les portes étaient ouvertes. Avec le temps il y avait des allées et venues continuelles et le bâtiment était en pleine lumière. YinShidan se mit un peu sur le côté, Pour mieux voir? puis éternua et toussa. L’ayant entendu, le vieillard sortit et s’agenouilla devant lui : « Cette nuit on procède au mariage de ma fille. On n’a pas prévu que ça pourrait enfreindre aux intentions du noble : j’espère que notre faute ne soit pas trop grave ! » YinShidan se leva et donna la main au vieux : « Je ne savait pas que cette nuit il faudrait satisfaire au protocole universel de la fête joyeuse ! 礼, « Li », étant une des notions les plus fondamentales de la pensée\société chinoise, est le centre de gravitation de cette nouvelle-ci C’est vraiment à regretter mais j’ai pas apporté de cadeau ! » Le vieillard dit : « Le noble a déjà agi en porte-bonheurs parce qu‘ avec sa présence qui nous honore il conjure les esprits malfaisants ! Si vous nous permettriez en plus à vous accompagner ça nous gâterait même ! » Ravi, YinShidan le suivit dans la maison qui était décorée à merveille. Une femme aux plus de quarante ans apparut qui lui présenta ses hommages. « C’est ma femme ! » dit le vieillard. YinShidan accomplit le geste de politesse requis. Peu après, les sons de la flûte de Pan emplirent l’oreille et quelqu’un entra en courant et proclama : « Ils sont arrivés ! » Le vieillard courut dehors pour faire le bon accueil tandis que YinShidan resta debout, attendant. Peu après, une petite troupe portant des lampions couverts de gaze conduisit le marié dans la maison. Il devrait avoir dix-sept ou dix-huit ans et était charmant et beau. Le vieillard le fit d’abord présenter ses hommages à l’hôte vénérable qu’était YinShidan. Le jeune homme le dévisagea. YinShidan performa la cérémonie d’accueil du marié dans la maison avant même que les formalités entre marié et beau-père n’eussent eu lieu. Le 礼 dans le cas d’YinShidan et du vieillard nécessitant l’inversion des rôles d’hôte et d’invité Cela fait, ils se mirent à table. Après un petit moment les arômes des plats de viande et du vin se firent sentir quand les bonnes apportèrent les dessertes et crédences sur lesquelles resplendissaient des coupes en jade et des coupelles en or. Après plusieurs tournées de vin, le vieillard ordonna à une servante d’aller inviter la mariée à la cérémonie. Elle se fit attendre pendant très longtemps jusqu’à ce que le vieillard lui-même s’y prit, écartant les rideaux pour la solliciter. Peu après, des servantes et femmes de générations différentes poussaient la mariée dehors qui était plongée dans le tintement des anneaux de jade et un mélange épais des fragrances du musc et de l’orchidée. Le vieillard lui commanda de présenter ses hommages à YinShidan. Cela fait, elle prit place à côté de sa mère. Un regard discret révéla à YinShidan que la femme, qui avait la perle montée en boucle d’oreille et les cheveux fixés en chignon par l’épingle de phénix, etait une beauté. Ensuite, le vin fut versé dans des grandes coupes rituelles en bronze. 爵, « Jue » – récipient à trois pieds et à bec long YinShidan, s’imaginant que cette coupe servirait de pièce à conviction excellente pour ses copains à l’extérieur, cacha la sienne dans la manche large de son costume. Puis, se penchant sur la table, il fit semblant d’être ivre mort et de dormir. « Le vénérable est ivre ! » affirma tout le monde. Peu de temps après, le marié prit congé et quitta le bâtiment précipitamment aux sons de la flûte de Pan. La cérémonie étant finie, l’hôte se mit à ramasser les timbales. Il manqua une coupe que – mystérieusement – on n’arrivait pas à récupérer. Quelqu’un laissa peser des soupçons sur YinShidan mais le vieillard instantanément coupa court à toute discussion craignant que le fonctionnaire ne pût la surprendre. Quelque temps après, le calme revenu, il bougea, plongé dans le noir dans un espace enclos des odeurs de l’alcool et de la graisse. Il faisait jour déjà, c’est ainsi qu’il sortit facilement. Tâtonnant dans sa manche il mit la main sur la coupe et quand il arriva à la porte du domaine ses confrères étaient déjà là. Ils le soupçonnèrent d’avoir quitté les lieux dans la nuit et de s’y être réintroduit très tôt le matin. À leur grand étonnement, le fonctionnaire leur montra la coupe cérémoniale. Il rendit compte des évènements nocturnes et ils étaient tous d’accord qu’un objet précieux comme ça ne pourrait jamais appartenir à un lettré pauvre comme lui et, par conséquence, le crurent. Avec le temps YinShidan fut promu Jinshi Un rang qu’impliquait des examens surveillés par l’empereur en personne et par la suite occupa un poste à FeiQiu. Un commentaire à ma portée me dit que le nom de cet endroit se déroberait à toute érudition. J’objecte : « fei » signifie « gras » et « qiu » signifie « monticule » ! Du coup : il s’agit d’un nom parlant : « nomen est omen » ! (On partira toujours du principe que le fonctionnaire va « s’engraisser » 🙂 Un beau jour, YinShidan fut invité à un dîner chez la famille Zhu dont étaient originaires des fonctionnaires depuis plusieurs générations déjà. La « bonne famille » : le mobile du mariage clandestin que voici ! À un moment donné, l’hôte donna l’ordre de sortir les grandes coupes. Le domestique se faisait attendre pendant un bon moment jusqu’enfin un larbin vint qui échangea quelques propos en catimini avec le maître de maison. Le dernier était fâché. Puis, offrant une grande coupe en bronze à YinShidan, il l’invita à boire. Celui-ci inspecta de près la coupe qui était exécutée de la même façon et portait la même gravure que celle de provenance inconnue qu’il avait en sa possession. 狐signifie « renard » . Tout autant qu’en français (ou l’allemand ‚for that matter‘) le renard figure en symbole de la ruse. La coupe étant une « chose-renard » veut dire à la fois : 1. YinShidan l’a piquée. 2. Parce que la cérémonie de mariage s’avait déroulée dans un domaine hors de la société, (la « propriété hantée » etc.) toutes les actes qui y avaient étées effectuées sont périmées le moment même où on quitte les lieux : ‚what happens in Las Vegas, stays in Las Vegas‘ ! Outre celui d’YinShidan, pendant le mariage pas un seul nom n’est mentionné ! Cela pour dire que le statut de l’origine de la coupe du point de vue légale – et d‘ YinShidan aussi – vraiment était inconnu jusqu’à ce point là ! Douteux, « Doute » et « Soupçon » ne s’équivalent pas du tout : celles et ceux qui veulent s’épargner la besogne de couper les cheveux sémantiques en quatre seront condamné(e)s à subir tous les effets du soi-disant Output isotrope de l’Intelligence Artificielle ! ‚Argumentation mining‘, ’nudging‘, ‚predictive policing‘ etc. constitueront l’antithèse même de toutes nos valeurs traditionelles – sans doute ! il demanda son origine à l’hôte. « Pendant que mon père était fonctionnaire en capitale, il y trouva un artisan très doué pour surveiller la production de ses coupes ! Il nous en a laissé huit en héritage et qui sont enveloppées dans plusieurs couches d’emballage depuis longtemps déjà. Ce n’est qu’à l’occasion de vôtre visite honorifique qu’on les a sorties du coffre. » « Mais figurez-vous » dit-il, « il nous en reste sept seulement ! On avait soupçonné les domestiques d’en avoir volées une, mais la couche de poussière qui a pris depuis une dizaine d’années n’est pas écorchée ! On se trouve devant une énigme ! » YinShidan ria : « La coupe en bronze s’est envolée ! Mais il ne se doit pas qu’on perde un bien reçu en héritage : justement, j’ai une coupe qui ressemble la vôtre à merveille et qui convient pour cadeau ! » Après le repas, il retourna à sa résidence et fit remettre la coupe immédiatement. La scrutant, le propriétaire fut renversé et se rendit à la préfecture en personne pour remercier YinShidan. Il se renseignait sur la provenance de la coupe et le fonctionnaire lui en fit le récit du début jusqu’à la fin. La morale de l’histoire que voici : ce dont le renard s’empare il finira par s’en séparer ! P.-S. : Lisez la traduction de Herbert A. Giles et vous vous convaincrez qu’il n’a pas vu la nouvelle !
014_王成
WangCheng, rejeton d’une bonne famille à PingYuan, était de nature extrêmement paresseuse. Sa situation se dégradant de jour en jour, il ne lui restait que quelques pièces d’une maison délabrée. Pendant l’hiver lui et sa femme n’avaient qu’à s’enrouler dans des couvertures de bétail ; par conséquence ils se querellaient sans cesse. C’était une fois en pleine chaleur estivale quand Wang, comme beaucoup d’autres villageois, avait passé la nuit dans un pavillon dans le jardin abandonné de la famille Zhou. Au crépuscule tous les villageois étaient partis sauf lui qui restait jusqu’à ce que le soleil « arriva à la hauteur de trois tiges de bambou ». Il procrastinait encore sa rentrée lorsqu’il vit tout d’un coup quelque chose dans les hautes herbes : une pince à cheveux qui portait la désignation « Maison Du Gendre Royal » Wang se rappelait bien ce genre d’objets parce que l’un de ses ancêtres avait appartenu à la « Maison Du Gendre Bien Mesuré » : Le patronyme 衡 est un nom riche en connotations qui signifie à la fois « fléau », « joug », « peser », « régularité » etc. désignation, qu‘ avait été gravée sur bien nombre d’objets dans la maison dans son enfance. Hésitant il prit le clip, mais à ce moment-là une vieille femme apparut qui était à la recherche précisément de cette même agrafe. Wang, qui était aussi de nature intègre, la lui remit d’un geste vif. La vieille était ravie et loua sa vertu : « Cette pince qui vaut bien son prix est la succession de mon époux ! » dit-elle. « Qui est-ce qui est vôtre honorable seigneur ? » demanda Wang. « C’est l’ancien gendre royal WangJianzhi » répondit-elle. Wang fut étonné : « Mais c’est mon ancêtre! Comment est-ce même possible que vous l’eussiez rencontré ? » La vieille se montra également étonnée : « T’es l’arrière-petit-fils de WangJianzhi ? Moi – je suis une fée ! » déclara-t-elle. « Il y a une centaine d’années que j’étais étroitement liée avec ton ancêtre. Après sa mort je me suis mise à l’abri ; quand je suis passée par ici, j’ai perdu la pince qui est tombée justement entre les mains du descendant : voilà ce que j’appelle hasard céleste ! » conclut-elle. Wang, qui avait plus tôt déjà entendu parler d’une « épouse-renard » du côté de son ancêtre, crut tout ce qu’elle proposa et l’invita chez lui. À la maison il fit venir sa femme dont la veste ouatée était déchirée et qui avait le visage marqué par la faim. La vieille soupira et dit: « S’il en est ainsi pour la tenue de la maison, comment est-ce que vous subvenez aux besoins du ménage ? » Quand la femme de Wang en sanglotant lui détailla tout l’état de leur pauvreté, la vieille lui donna la pince pour qu’elle la hypothéquât et achetât du riz. Puis elle leur demanda une autre rencontre, trois jours plus tard, et voulut partir. Wang la retint mais elle objecta : « Tu ne parviens même pas à nourrir une épouse ! À quoi bon rester ici et regarder dans le toit vide ? » Elle partit. Wang raconta toute l’histoire de la vieille à sa femme effrayée en louant beaucoup sa vertu ; il la sollicita de traiter la vieille en belle-mère et elle consentit. Trois jours après, la vieille revint et leur donna encore une fois de quoi acheter du riz et du pain. Pendant la nuit elle partagea le lit avec la femme de Wang dont la peur s’aurait estompée au fur et à mesure que la bienveillance de la vieille se révela. Le lendemain elle dit à Wang : « Fils, tu manque de bon sens ! Il convient d’excercer un petit boulot plutôt que d’épuiser ses dernières ressources sans rien faire! » Wang objecta qu’il ne disposerait pas du capital nécessaire. Elle répondit : « À l’époque, ton ancêtre disposait des richesses à sa guise. Moi, de l’autre côté, en tant que personne qui ne fait pas partie du monde, je n’en ai pas besoin en premier lieu : du coup je ne me suis jamais enrichie. Néanmoins, je dispose encore de 40 Liang « d’argent de maquillage » dont je ne me suis jamais servi et avec quoi on peut acheter du tissu de chanvre. (Pueraria Thunbergiana) Si l’on met ça sur le marché, et dans un délai précis, on peut obtenir un faible rendement ! » Wang la suivit au marché et y acheta plus de 50 ballots d’étoffe. Rentré à la maison la vieille aussitôt l’enjoignit à faire ses préparatifs pour un voyage de 6 ou 7 jours à Beijing. Elle l’exhorta : « Il faut que tu te fatigues et ne te laisses pas aller ! Il faut que tu te dépêches et ne traînes pas : si tu arrivais en retard pour un jour seulement tu le regretterais ! » Wang accepta avec déférence, fit son paquet et partit. En route, il rencontra de la pluie qui trempa son vêtement et ses chaussures. Wang, qui n’avait jamais de la vie éprouvé aucun vent froid, ne l’endurait pas et se retira dans une auberge. Qui l’aurait pensé, mais la pluie tomba à torrents pendant toute la nuit et le lendemain le chemin se présenta comme fosse de boue. Lorsqu’il vit que les passants s’y enfoncaient jusqu’aux mollets, WangCheng recula devant cet effort. À midi le ciel se présenta sous un aspect plus prometteur mais alors les nuages s’amassèrent de nouveau et la pluie recommença, partant il resta encore une nuit avant qu’il ne partît. S’approchant finalement de la capitale, il apprit que le prix du chanvre était en hausse et se réjouit. Mais quand il atteignit Beijing et déposa son fardeau dans l’auberge, son hôte le prit en pitié : c’est parce que les routes vers le sud d’où vient Wang justement venaient d’être praticables que le chanvre qui arrivait avait toujours fait défaut. Ainsi le prince chargé de l’approvisionnement en achetait-il à un prix excessif. Mais la veille la demande justement vint d’être satisfaite et les marchands en retard dorénavant n’auraient plus aucune chance pour profiter de cette hausse. Wang fut déçu. Le lendemain encore plus de chanvre arriva ce qui fit baisser le prix davantage. La plus-value échapée, WangCheng ne voulut plus vendre et s’attardit encore une dizaine de jours. Dans l’intervalle, les frais pour le logis s’accumulaient ce qui ajouta à son abattement. Son hôte lui conseilla de liquider la marchandise et de dresser un autre plan. Suivant son conseil, Wang lança tout sur le marché d’un seul coup ce qui le fit perdre 10 Liang. Le lendemain, il se leva tôt pour faire ses préparatifs pour rentrer dans son pays. Mais quand il ouvrit son sac de voyage, l’argent ne s’y trouvait plus. Excité, il s’adressa à son hôte qui ne put donner de bonnes indications par ailleurs. Quelqu’un lui recommenda de porter plainte pour que l’aubergiste le dédommageât remarque apparement innocente ; en vérité, elle tient place de ce même que Roland Barthes dans « S/Z » a nommé « code de référence » : le lecteur\la lectrice est informé.e que Wang en fait dispose de cette option : qu’une responsabilité quelconque de la part de l’aubergiste entre en jeu ici mais WangCheng soupira : « Cette fortune se rapporte à moi tout seul – l’hôte n’y est pour rien ! » Le patron vanta beaucoup sa vertu : il offrit 5 Liang à WangCheng indice de sa culpabilité et, tout en le consolant, l’incita à rentrer, mais Wang, qui songea à ce qu’il n’avait rien à faire valoir auprès de son bisaïeule, était dans l’impossibilité complète de partir. À ce moment il vit les gens, qui s’adonnèrent aux combats de coqs, miser plusieurs milliers à chaque pari. Il s’aperçut du fait que maintes fois une caille d’une qualité exceptionnelle se vendait à plus de cent pièces. Inspiré, il compta son argent et trouva la somme presque suffisante pour acheter des cailles à la campagne. Il négocia la matière avec le patron qui l’animait encore plus. Ils se mirent d’accord que Wang resterait logé et nourri sans payer. Ravi, Wang quitta Beijing pour acheter tout un panier plein de cailles. Quand il rentra, le patron le félicita de son négoce rapide. Mais dans la nuit la pluie commença à tomber, à tel point que le lendemain toutes les rues s’étaient muées en rivières. Wang regardait dans la bruine en attendant que le ciel se dégageât mais le mauvais temps dura plusieurs jours. Quand il leva le couvercle du panier, il vit que les cailles étaient en train de crever mais, effaré, il n’y voyait aucune issue. Le lendemain encore plus de cailles étaient mortes. Il mit les quelques-unes qui lui restaient encore dans une cage pour les nourrir en commun – mais une seule caille aurait survécu la nuit suivante. Baigné de larmes, il se plaignit auprès de son hôte qui ne put que saisir son propre poignet. Les fonds perdu, Wang ne se voyait plus en mesure de rentrer dans son pays et songea même au suicide mais le patron le consola. Celui-ci devrait se consoler soi-même, aussi : il a déjà perdu ses 5 Liang sans pour autant s’avoir débarrassé de celui qui toujours pourrait porter plainte contre lui Contemplant la caille de près, le dernier dit : « Ceci est un animal spécial : il se peut que la mort des autres cailles se doive à celle-ci ! De l’autre côté vous êtes libre dans l’emploi de votre temps, du coup : je propose de dresser ce coq. S’il se montre approprié au combat ça pourrait même assurer votre subsistance ! » Wang suit son conseil et quand la créature fut prête, le patron l’instiga à l’amener dans la rue pour y parier de quoi boire et manger. Effectivement, la caille se révéla très forte et gagna tout de suite. Le patron fut ravi et donna de l’argent à Wang pour qu’il pariât avec les adolescents nantis. Wang et les adolescents nantis appartiennent à la même souche sociétale – le patron sait très bien à qui il a affaire et il sait d’en profiter Par la suite il l’emporterait chaque fois et un demi an plus tard il aurait gagné 20 pièces d’argent. Serein, WangCheng maintenant surveillait la caille comme la prunelle de ses yeux.
L’affaire se présente de la manière suivante : le prince héritier aimait beaucoup les cailles et au début de chaque année il invitait tous ceux qui s’investissaient dans le combat de coqs de participer à une compétition dans sa résidence. Du coup, un jour le patron dit à Wang : « Sachez qu’aujourd’hui d’importantes richesses peuvent être acquéries – ça c’est sûr ! Ce qui fait partie de notre sort à nous, de l’autre côté, on le saura jamais ! » Les propos du patron évidemment font l’écho de la proposition de Wang ci-dessus : si le dernier avait souligné sa « fortune » 数, le patron par contre invoque 命 : le destin, le sort… Ce n’est qu’après qu‘ il avait fixé son hôte de cette manière en guise d’alibi morale pour s’excuser à l’avance de sa propre intention malveillante ? que le patron renseigna WangCheng sur cette compétition annuelle. C’est maintenant qu‘ il donne « l’information » : le patron, qui connaît bien la passivité généralisée de son hôte, fait preuve de mauvaise foi Quand ils y allèrent ensemble, il l’exhorta une fois de plus : « Dans le cas où à votre grande déception vous perdriez : contentez-vous à quitter les lieux ! » dit-il. En d’autres mots : « Ne faites pas une scène ! » C’est quelque peu risqué que d’emmener Wang chez le prince : un homme dont le comportement économique fait fi de toute une constitution du « bon sens » « Mais si votre caille sortait gagnante le prince certainement voudrait l’acheter : dans ce cas n’acceptez pas ! Si le prince insiste, ferez attention à mon expression : attendez jusqu’à ce que je hoche la tête avant que vous n’acceptiez son offre ! » WangCheng dit : « D’accord ! » À la résidence, devant le grand escalier extérieur, les concurrents jouèrent des coudes. Peu après, le prince sortit et son entourage proclama : « Quiconque aimerait lancer un défi : qu’il monte par ici ! » Un homme qui tenait une caille dans ses mains entra à pas pressés. Le prince ordonna de lâcher les coqs et après quelques coups d’ailes le challenger avait perdu. Le prince riait à pleine gorge. Après que plusieurs compétiteurs avaient de cette façon vite perdu, le patron dit : « Allons-y ! » et il se procura lui-même aussi l’autorisation d’entrer dans la résidence en appuyant 相 signifie « assister » – connotant une autorité supérieure impliquée à laquelle on porte assistance ; autre acception du mot : « chancellier » : En tant que non-participant, le patron aurait à coup sûr besoin d’une autorisation normative quelconque pour pouvoir mordre sur la ligne de la résidence du prince Wang qui monta l’escalier. Le prince l’examina Amphibologie : le prince examine : qui : L’aubergiste ? La caille ? La caille bien sûr : ça « va de soi » ; mais en arrière de la tête il faut toujours réserver la possibilité que l’auteur eût joué avec le signifiant ! (Même si la translation vulgarisée en chinois moderne à ma portée n’en tient pas compte de cette duplicité linguistiquement cependant possible. C’est pour dire qu’il faut se méfier de toutes les institutions qui garantissent la propagation d’une culture sous l’égide d’une unité quelconque dans l’intérêt du signifié controllable) Ce qui « va de soi » c’est exclusivement la « faule Vernunft » comme dit Immanuel Kant : la « raison paresseuse » – en l’occurrence celle du lecteur-consommateur\de la lectrice-consommatrice d’un « lisible » stéréotypique ! (dans le collimateur de Roland Barthes)
Il m’a fallu le dire, hic et nunc, devant l’interface numérique ubiquitaire : « Human Agent Interaction », « ChatGPT », « Grammarly », Alexa etc. caractériseront – j’en suis convaincu – toute l’ère électromagnétique de « l’intelligence artificielle » qui est en train de se matérialiser sous nos yeux ! C’est pour cela qu’il faut que nous préservions\installions etc. des espaces logico-sociales « à l’extérieur » de cette bulle gonflante… et dit : « Dans ses yeux on voit le battement de son coeur : ceci est un coq fort qu’on ne doit pas sous-estimer ! » Il ordonna de sortir le nommé « bec de fer ». Mais après quelques sauts, ce coq avait des ailes blessées. Des meilleures cailles furent choisies mais chaque fois celle de WangCheng gagnait. Inquiet, le prince ordonna de sortir la « caille en jade », sa championne. Celle-ci avait les ailes blanches tout comme le héron de soie (Egretta Garzetta, le plus petit représentant de l’espèce des hérons ; le prince tricherait ? S’enchaîne une phrase plutôt miroitante 神骏 qui pourrait servir de charnière sémantique et qui rend deux propositions totalement différentes, selon le point de vue : 1. « la caille était particulièrement grande », 2. « le visage (du prince) exprimait de la sévérité » Je ne me trompe pas : le prince triche 🙂 et était d’un aspect tout à fait impressionnant. WangCheng perdit son courage. Il s’agenouilla et implora le prince de mettre fin à la compétition : « La caille de Votre Altesse c’est un être divin. J’ai peur qu’il ne blesse mon oiseau et que je perde ma subsistance ! » Bien sûr que Wang ne devrait appeler le héron de par sa dénomination vraie : il ne lui reste que de relever la différence purement logique entre l’espèce de la caille et l’ordre des oiseaux – c’est l’auteur de cette nouvelle même qui par le biais de son protagoniste réverbère l’impasse de l’intellectuel\le Le prince ria : « Lâchez-les ! S’il crève dans le combat, tu vas être largement dédommagé ! » Wang lâcha et la caille en jade immédiatement fondit sur sa proie. Mais le gallinacé 鸡 autre signe en plus qui connote la différence d’espèce, donc la tricherie furieux attendait son adversaire sans même bouger et quand la caille en jade donna un coup de bec il se leva comme la grue la « grue » .. c’est un terme très louangeur ! dans le ciel et l’attaqua. Il se produit un va-et-vient incessant, chaque coq tenant l’autre en respect pendant le temps qu’on met à retenir son souffle. Quand la caille en jade commença à se fatiguer, la lutte s’intensifia même et sous peu des plumes neigeuses tombèrent et l’adversaire laissa pendre ses ailes prenant la fuite ! Mille personnes avaient vu ce combat et personne d’entre eux qui n’aurait témoigné son admiration profonde. Le prince prit la caille entre ses mains et l’examina à partir des griffes jusqu’au bec. Puis il demanda à Wang : « Est-ce que cette caille est à vendre ? » « Je ne dispose pas de revenus réguliers » répondit Wang réponse tout de même astucieuse parce que de cette manière il s’exclut à priori comme contribuable:-) « J’en dépend pour ma subsistance, du coup je ne désire pas la vendre » « Je t’octroie une grosse somme » dit le prince, 赐而重值 au pied de la lettre (et contextuellement) : « Ce que je t’octroie c’est de daigner peser la valeur de ta caille de sorte que le curseur soit positionné plutôt du côté lourd sur le fléau de la balance » La langue du prince relèverait d’une certaine violence, à mon avis ; quoi qu’il en soit : les faits sociaux seraient de toute manière masqués par les idiomes stéréotypiques « Avec ça un bien-fonds à la hauteur de la classe moyenne t’est atteignable : c’est ça, ce que tu aimerais bien, hein ! » Wang baissa la tête et pensa pendant un bon moment, puis il dit : « Le fait que Votre Altesse aime bien cette caille pèse plus que mon envie de la garder. Si cela contribue à me procurer de quoi vivre je ne peux revendiquer en plus ! » Le prince demanda le prix et Wang voulut 1000 pièces d’or. Le prince ria : « Fou ! Quel objet précieux vaudrait mille pièces d’or ! » WangCheng objecta : « Votre Altesse ne prend pas ma caille pour un trésor – moi de l’autre côté je suis d’opinion qu’elle vaille même plus que les 15 bastides que l’empereur des Qin a daigné payer pour la fameuse Jade du royaume des Chu » Le prince demanda : « Pourquoi ? » « Cette caille je peux la lancer quotidiennement sur le marché et elle me rapportera chaque fois plusieurs pièces d’argent. Ainsi je peux acheter un seau plein de millet et nourrir une famille de dix personnes sans que je doive me soucier de rien : quel trésor égalerait ça ? » Ce que Wang profère ici représente exactement le rêve du peuple, rassemblé devant l’escalier : cette nouvelle est également un texte politique Le prince dit : « Je ne veux pas causer un préjudice à toi : je te donne 200 pièces ! » WangCheng secoua la tête. Le prince augmenta l’offre de 100 pièces. WangCheng jeta un coup d’œil sur son patron qui avait le visage impassible. Puis il dit : « Je m’incline devant le geste de Votre Altesse » qui vient de surenchérir « et réduis le prix de 100 pièces ! » « Arrête donc ! Qui est-ce qui donnerait 900 pièces pour une caille ! » Wang mit la caille dans le sac et voulut partir. Le prince le héla : « Homme de caille, eh bien ! Homme de caille, eh bien ! » Il me semble que dans cette phrase « caille » fonctionne bien comme attribut de « l’homme » : le mot grammaticale 之 étant supprimé ? Aussi, la répétition même de ce « nom » relève d’une rime enfantine, d’une raillerie, d’un mépris ? Ou bien s’agirait-il d’une simple façon de parler innocente sur le marché ? Sais pas… « Je te donne vraiment 600 pièces ! Donne ton accord, sinon l’affaire est reglée pour moi ! » WangCheng reluqua de nouveau son patron mais celui-ci fit toujours comme si de rien n’était. Mais son propre plus cher désir fut déjà bien comblé et ce dont WangCheng était singulièrement soucieux maintenant c’était de laisser passer cette occasion : « ça ne me plaît pas du tout que de vendre à ce prix-là » dit-il, « néanmoins, si le marché n’est pas conclu mon mécontentement sera même plus grand ! » C’est un marché de gré à gré : pour garder le juste milieu, Wang n’a rien à faire que de baisser son prix de ces mêmes 300 pièces dont le prince avait daigné de surenchérir. Pour obtenir un meilleur résultat par contre, il devrait maintenant se donner de la peine, c.à d. quitter la « zone de confort » enculturalisée « Je n’ai pas d’autre choix – à vos ordres ! » dit-il. Le prince était ravi et l’argent fut pesé. WangCheng mit l’argent dans son sac, accomplit le geste de remerciement et s’en alla. Plein de répugnance son hôte dit : « Pourquoi est-ce que vous avez eu si hâte de vendre ! Si on lui avait tenu la bride haute, on aurait 800 pièces dans les mains ! » « On » = « Moi » ? On ne peut pas ne pas voir la parallèle structurale entre l’aubergiste et le prince : une simple tournure aurait suffi et le protagoniste avait été leur victime en commun : voleur et tricheur respectivement, tous les deux relèvent d’une superstructure économique que l’auteur lui-même ne doit pas pointer du doigt directement\naivement\stéréotypiquement Wang rentra à l’auberge. Il jeta l’argent sur la table et demanda au patron de se dédommager mais le dernier refusa ; ce n’est qu’après Wang avait insisté que le patron dressa la facture avec son abaque. L’aubergiste, qui durant un demi an devrait avoir beaucoup profité de son hôte, aurait certainement préféré que le tas d’argent resterait à sa propre portée plutôt qu’à la portée d’un destin plus indécis:-) Wang rentra dans son pays. À la maison il raconta tout ce qu’il avait fait et quand il sortit l’argent les autres le félicitèrent. La vieille ordonna d’acheter un terrain fertile de 20 hectares et de faire construire une maison et tous les ustensiles nécessaires. De la sorte, leur niveau de vie dorénavant ressemblait à celui d’une bonne famille. Par la suite, tous les matins elle se levait tôt et instiguait WangCheng et sa femme à surveiller respectivement le travail dans les champs et le tissage : si un valet montrait le plus faible signe de paresse il faudrait aussitôt le réprimander ! En observant de telle manière tous les commandements de la vieille, le couple vivait en paix il n’y avait plus de querelles:-) et trois années plus tard, leur foyer rapportait des bénéfices. Un beau jour, la vieille leur dit au revoir : quand ils l’implorèrent de rester, elle ne résistait point ; mais quand ils l’attendaient le lendemain, elle fut partie !
On dit que toute richesse se doit à la diligence. Mais dans ce cas-ci elle se doit à la paresse, constatation de fait : si WangCheng n’avait pas accepté l’offre du prince, l’issue aurait pu être tout autre ce qui est remarquable ! Qui sait si les vertus d’un homme seront à l’abri de la corruption par la pauvreté ? Si que oui – ça voudrait dire que la nature eût d’abord lâché cet homme pour le prendre en pitié à la fin ; mais, pour autant qu’on puisse juger, les richesses ne débutent jamais de par la paresse !
015_封三娘
Mademoiselle FanShiyi était la fille du président de l’Académie à LuCheng. Le caractère désignant le nom du lieu ne se trouve pas dans les dictionnaires, mais ses composants permettent néanmoins une lecture pertinente : le caractère composant : « champ agricole » montre les sentiers qui traversent (et soumettent à la même fois à un cadastre) le terrain où existe l’homme labourant ; l’autre : « cerf » a en plus l’acception métaphorique de « domaine, royauté » : donc, le caractère composé semble raconter de par lui-même toute une histoire du peuple et pointer du doigt une scène où il en va de la survie\du pouvoir – c’est un véritable « appel du pied » (de la lettre) et une clé pour la lecture : dans la suite, le lecteur\la lectrice doit être attentif\ve à un signifiant qui « s’évade » du lieu commun ! (En ce qui concerne les noms propres des protagonistes, ils vont dans la même direction : « Fan » signifie « loi », « règle » etc, « Feng » désigne la poignée de terre que le suzerain octroie au vassal, « Meng » se réfère à MengZi (372 – 289 avant J-C), Philosophe qui souligne l’importance de la vertu dans la politique et qui a influé sur le Confucianisme pendant les époques des Ming et des Qing) Elle était très belle et s’appliquait à la poésie qu’elle maîtrisait extrêmement bien. Ses parents l’idôlatraient et étaient disposés à lui laisser la main libre de choisir de son propre chef son futur mari – mais jusqu’à ce jour elle avait toujours refusé tous les prétendants. C’était mi-janvier quand elle, comme beaucoup d’autres femmes de lacontrée, alla voir la fête des morts (Sanscrit : ullambana) qu’était organisée par les réligieuses du Temple de l’Eau et la Lune. S’y amusant, elle remarqua soudainement une fille qui la suivait et qui lui regarda à plusieurs reprises dans les yeux comme si elle ne voulait dire quelque chose. C’était une véritable Vénus qui l’attira beaucoup et FanShiyi se retourna vers elle pour mieux la scruter à son tour. La fille souria : « Vous êtes FanShiyi, n’est-ce pas ? » « Oui ! » « J’ai entendu parler de votre bonne réputation – ce que les gens disent s’avère juste ! » dit-elle. Mademoiselle FanShiyi lui demanda son nom, aussi. Elle lui demande son « liju », son « adresse » : en premier lieu, donc : le nom de la famille d’ou elle provient La fille ria : « Je m’appelle FengSan, j’habite le village voisin. » Contrairement à FanShiyi, elle met en avant son nom propre plutôt que des coordonnées sociétales ; leurs présentations respectives sont révélatrices d’une certaine « incompatibilié » sur le plan sociétale dont atteste l’éclatement de rire de FengSan qui contraste avec son « sourire » non marqué Sous peu, les deux marchaient joyeusement bras dessus, bras dessous en s’entretenant chaleureusement. Par la suite, l’affection entre les deux était mutuelle et elles tardaient à se quitter. Mademoiselle FanShiyi demanda : « Comment se peut-il que vous n’avez pas de partenaire ? » Réponse : « J’ai tôt perdu mes parents, maintenant une vieille dame garde la maison, c’est pour cela que je n’ai pas obtenu la visite d’un prétendant. » Ci-dessus, l’épithète choisie pour dénoter la beauté de FengSan est 二八绝代, les deux premiers caractères signifiant « deux, huit » : c.à.d. elle devrait avoir seize ans, tout autant que FanShiyi. (ndlr : il y a un vieux « pop song » chinois dans laquelle la protagoniste exige plus de liberté d’action auprès de ses parents – mettant le point d’orgue justement sur son âge : « seize ans e t d e m i » 🙂 Quand Mademoiselle FanShiyi voulut rentrer, les prunelles de FengSan se figèrent et elle était sur le point de pleurer. FanShiyi aussi avait perdu sa contenance et l’invita chez soi. Mais FengSan répondit : « Vous êtes originaire d’une maison illustre et fameuse – moi, je n’ai aucune relation familiale avec vous : je crains que notre fréquentation ne suscite de la moquerie et de l’aversion de la part d’autrui. » Quand FanShiyi insista, elle dit simplement : « Une autre fois ! » Puis, FanShiyi détacha une agraffe en or de ses cheveux et la donna en cadeau à FengSan qui de son côté tira une pince verte de son chignon. Le chignon représenterait son statut de mariée : FengSan ment pour remerciement. De retour, FanShiyi songeait sans cesse à cette rencontre extraordinairement avenante. 倾想殊切elle « s’abîme » (« Fragments d’un discours amoureux », R.Barthes) Elle scruta la pince à cheveux qui ne consistait ni de métal ni de pierre. Le sujet aimé n’est pas classable : « atopos » (ibid.) Personne dans sa famille ne pouvait identifier le matériau de cet objet extraordinaire non plus. La société ne daigne pas fournir de catégories – du moins louangeurs – pour comprendre « cela » Dès lors, elle ésperait chaque jour la visite de FengSan, mais la dernière ne parut pas et la déception finit par la rendre malade. Ses parents, après avoir réussi à trouver la cause de sa souffrance, envoyèrent leurs domestiques au village voisin pour enquêter, mais personne n’y connaissait FengSan.
Au neuvième du septembre, Jour de fête, riche en connotations, nommé « double-neuf », « fête sur les montagnes », « fêtes des filles », « fête du chrysanthème » etc. ; le neuf, selon le « YiJing » (un des textes les plus fondamentaux de la pensée chinoise et Confucius lui-même dit qu’il avait manié beaucoup cette méthode) est consideré un nombre « mâle » FanShiyi était amaigrie et dépressive. On se retrouve ici 8 mois plus tard : c’est la durée possible d’une grossesse – et un contre-temps qui a maigri FanShiyi Elle demanda ses domestiques de la porter sur une chaise à travers le jardin et d’y aménager une carpette près de la « palissade à l’est » 1. Ce jour-là, c’est l’endroit dédié à l’appréciation du chrysanthème. 2. Dans l’étymologie – à nous occidentaux – le « paradis » justement signifie : « enclos », « jardin » Tout d’un coup, il y avait une fille qui s’avait hissée au mur et qui la lorgna : c’était FengSan qui appela les servantes : « Aidez-moi à descendre de la mur ! » Heureuse, FanShiyi se leva pour prendre ses mains et la tira vers la carpette Il y a deux mouvements spatiaux opposés ( FanShiyi qui se lève versus FengSan qui descend de la mur + est tirée vers le bas ) qui annoncent le cours du suivant : l’auto-reférentiel fort indique une « écriture » plutôt qu’une « écrivance » (R.Barthes) et en lisant il faut prendre tous les mots à la lettre et ne pas laisser rien « échapper » ! Elle lui reprocha d’avoir manqué leur rendez-vous FengSan avait simplement promit : « une autre fois » et la demanda d’où elle venait. « Ma famille vit plutôt loin d’ici. C’est que, de temps en temps je viens par ici rendre visite à mon oncle. Ce que j’avais dit auparavant, en ce qui concerne le village voisin : ça se rapportait justement à la maison de mon oncle ! » Inventé de toutes pièces : elle aurait déjà menti en relevant ses cheveux en chignon pour connoter un statut sociétal faux « Après nos adieux je n’ai pensé qu’à vous » poursuit-elle « en fait, je n’ai pas osé franchir le seuil de votre maison parce que l’idée même des fréquentations entre riches et pauvres m’aintimidé beaucoup. Je craignais de me voir dépréciée par vos servantes et domestiques, c’est pourquoi je ne suis pas venue. Aujourd’hui, quand je viens de filer le long du mur, j‘ ai écouté des voix de femme et parce que j’espérais vous revoir, j’ai grimpé sur la mur. Je suis comblée ! » conclut-elle. Puis, Mademoiselle FanShiyi lui parla de la cause de sa propre maladie. FengSan était tout en larmes : « Le fait que je suis ici doit rester un secret ! » La « maladie » de FanShiyi étant un signe repérable de son amour « Si les bavards et intrigants font circuler la rumeur des insuffisances quelconques ça serait dur à supporter ! » Mademoiselle Shiyi l’approuva. Elles rentrèrent chez elle et se mirent au lit ensemble où elles s’épanchèrent allègrement auprès d’autrui. L’auteur lui-même ne daigne pas s’abaisser au rang des bavards : tandis qu’une version popularisée en chinois moderne informe le lecteur\la lectrice qu’elles 睡在一起 : « couchent avec l’autre », l’auteur simplement constate qu’elles 同榻 : elles se trouvent « dans le même lit » : ce qui est compréhensible, FanShiyi étant dans un état affaibli et que la rencontre des filles sympathisantes ne nécessite pas du tout de « distance de sécurité ». Bref : la sexualité c’est bien la première connotation, (ça « va de soi » comme dirait R.Barthes) mais ça n’est pas du tout équivalent à la dénotation du syntagme ! A propos de cette version popularisée à ma portée, ici les données bibliographiques atteignables de cet ersatz: version téléchargée aux environs de 2008 puis sauvegardée chez moi, déconnectée des réseaux : 白话聊斋, 刘刊 : photocopie « scannée » d’un livre original, 2 tomes, « output » en tant que document PDF (tome 1 :7678KB) : du coup: encore authentique. R.P.C., probablement Beijing. En fait dans une première phase, j’ai besoin d’une sorte de « vue d’ensemble » du texte-source, qui est écrit dans un chinois mi-classique il y a 300 ans déjà, avant que je ne puisse aborder le récit très dense de la nouvelle Sa maladie s’améliora immédiatement. 寻 – la version popularisée donne « graduellement » : elle n’ose même pas prendre la responsabilité de sa propre falsification – quelle horreur intellectuelle ! Dorénavant elles se traitaient en soeurs, l’une portant les chaussures et vêtements de l’autre et chaque fois que quelqu’un passa chez FanShiyi, FengSan se cachait dans les plis d’un rideau. Après cinq ou six mois, Une durée plus courte que les 8 mois impliqués ci-dessus, mais au regard d’un mûrissement du même signifié les parents de FanShiyi se doutaient de ce qu’il y avait anguille sous roche. Un jour, lorsque les filles jouaient aux échecs, la mère s’introduit en cachette dans la pièce. « Ca, alors ! Il y a vraiment une amie que voici ! » s’écria-t-elle. Elle s’adressa à sa fille : «Nous nous réjouissons de voir que tu reçoives une bonne copine dans ta chambre ! Pourquoi est-ce que tu ne nous as pas parlé de lui ? » FanShiyi lui fit connaître les réticences de FengSan. Ici, l’imaginaire de la mère subit une contagion informationnelle : le privilège que les parents bienveillants octroient à leur bien-aimée se heurte effectivement à la réalité sociétale La mère tourna le visage vers FengSan Dans ce phrase-ci, le mot 顾 est « en trop » donc, c’est un signe des forces sociétales déjà effectives : « (daigner) regarder » et dit : « On est très content et rassuré d’apprendre que vous tenez bonne compagnie à notre fille, à quoi bon dissimuler ? » La confusion colora les joues de FengSan qui était impuissante à parler et ne fit que tirer sur sa ceinture. Elle veut se débarrasser des vêtements de son amie – s’échapper de ce milieu. La mère veut savoir si les réticences de FengSan, dont elle vient d’apprendre sont bien fondées et, partant qu’il n’y aurait seulement une anguille sous roche mais des inconvenances aussi. A cela, FengSan ne peut pas répondre que par mutisme : « L’amoureux n’est pas homme de la bonne conscience » (Barthes, ibid.) Quand la mère fut partie, elle aussi voulut faire ses adieux à FanShiyi mais la dernière la décida de toutes ses forces à rester. Un soir, FengSan se précipita dans sa chambre en pleurant : « Je l’avais bien dit ! Aujourd’hui j’essuie effectivement cette grande honte ! » Et, répondant à l’effrayée : « Je viens de sortir des toilettes quand un jeune homme m’a grossièrement accosté ! C’est vraiment une chance que je pusse m’enfouir! S’il en est ainsi, comment pourrai-je me déplacer librement dans une maison où l’on ne me tient pas en estime ? » Après que Mademoiselle ShiYi lui avait appris la déscription de la personne elle s’excusa : « Rassurez-vous – il s’agit de mon bête frère ainé seulement. » L’épithète est admise chaleureusement dans le cadre familial seulement. L’économie sociétale de la vie sociétale « en dehors » ne lui permettrait guère de plaisanter avec le mâle « Je vais rapporter l’incident à ma mère afin qu’il ne reçoive des coups de bâton. » Mais FengSan exprima fermement sa volonté de partir. Quand Mademoiselle Shiyi la pria de rester jusqu’au lever du jour ruse : séduction FengSan dit : « La maison de mon oncle est tout près d’ici ! Je n’ai besoin que d’une échelle pour franchir la mur ! » Au lieu de sortir par la porte donnant sur le monde sociétale elle s’évade à travers le mur du jardin\paradis : 度“franchir » connote aussi bien le cercle de la régénération que le croyant du Bouddhisme doit surmonter : en ce qui concerne FengSan, le carrefour existentiel\matériel\sensuel est désormais derrière elle Mademoiselle Shiyi, sachant bien qu’elle ne retiendrait plus longtemps son amie, envoya deux servantes avec elle pour l’aider et l’accompagner. Mais après un demi mile parcouru seulement, FengSan les remercia et s’en alla toute seule. Quand les servantes retournèrent, Mademoiselle Shiyi restait allongée à plat ventre sur son lit, affligée comme si elle n’avait perdu son partenaire. 伉俪 « conjoints » Signe fort d’un possible caractère sexuel de leur relation Quelques mois plus tard, rentrant le soir, les servantes, qui avaient eu une chose à faire dans le village dans l’est, rencontrèrent FengSan qui marchait derrière une vieille dame. Réjouies, elles la saluèrent. Chagrinée, FengSan pris des nouvelles de Mademoiselle Shiyi. Les servantes la tirèrent par la manche : « Mademoiselle San : venez avec nous ! Notre jeune maîtresse se languit de vous voir ! » « Moi, je pense aussi ardemment à elle » dit FengSan, « mais je ne veux pas que les autres membres de la famille le sachent. Quand vous rentrez, laissez la porte du jardin entrouverte, je viendrai ! » leur dit-elle. De retour, les servantes mirent Mademoiselle Shiyi au courant de leur rencontre. Elle fut ravie et leur ordonna d’entrouvrir la porte, mais FengSan avait déjà été dans le jardin. Ndlr : la version popularisée ne montre pas ce détail : évidemment, ses éditeurs estiment qu’une causalité banale ( 1° ouvrir la porte 2° FengSan entre ) soit plus simplement à digérer pour les lecteurs \ consommateurs \ sujets politiques stressés, qui auraient d’autres chats à fouetter par ailleurs que de jeter un coup d’oeil dans leur propre âme humain – écoeurant.. ! Puis, chacune des deux raconta longuement à l’autre son propre vécu pendant l’interstice de leur séparation en sorte que leur entretien n’en finissait pas. Quand elle vit que les servantes dormirent profondément, FengSan se leva et se dirigea vers le lit où elle « partagea l’oreiller » avec Mademoiselle Shiyi qui, de nouveau, est amaigrie et affaiblie – je suppose ? Connotation sexuelle très forte, à cause du syntagme « partager l’oreiller ». Néanmoins, l’annotation ci-dessus – concernant le potin – serait encore valable : rapprochées, elle peuvent désormais à voix bien plus basse continuer leur conversation dangereuse ! Mais, c’est le narrateur\l’auteur lui même qui continue de provoquer notre mésentente : de cette manière il pointerait du doigt l’économie culpable de son temps, dans lequel et le lecteur et la lectrice jouent précisément un rôle décisif. Il s’agit de « son » temps, seulement ? et lui chuchota à l’oreille : « Je sais bien que vous n’avez pas encore donné votre consentement au mariage. Lorsqu’on tient en compte vos talents et votre belle apparence d’une part et la réputation de votre famille de l’autre, on dirait qu’un prétendant digne soit facilement à trouver. Mais les fils de famille dorlotés se comportent avec dédain Comme le frère de FanShiyi et ne sauraient pas entrer en ligne de compte ! Donc, si vous voulez trouver un excellent partenaire, il ne faut pas le juger selon sa fortune. » Mademoiselle Shiyi était du même avis. FengSan dit : « Là, où nous nous sommes rencontrées l’année dernière, on va de nouveau célébrer la fête : rendez-vous y encore une fois, demain : certainement qu’on tombera sur un jeune gentilhomme conforme à vos désirs ! Dans mon enfance j’ai lu des livres traitant de la physiognomonie – et je ne m’y prends pas mal du tout ! » affirmat-t-elle. Elles prirent rendez-vous au temple d’Aranyakah et à l’aube FengSan partit pour y être la première. Quand Mademoiselle Shiyi arriva au temple, elles firent le tour du champ de la fête avec beaucoup détachement 眺 « regarder au loin » (comme une vigie) ; « regarder du coin de l’oeil » : elles ne regardent pas le spectacle forain, mais elles se montrent eux-mêmes : elles se « prostituent » après quoi Mademoiselle Shiyi voulut aussitôt rentrer, avec
FengSan dans sa chaise à porteurs. Lorsqu’elles sortirent du terrain, la main dans la main, il y avait un bachelier d’une dix-sept ou dix-huit d’années qui portait un simple habit en lin sans ornement mais dont toute l’allure aimable témoignat de son distinction. FengSan l’indiqua en tapinois et dit : « Celui-là est très prometteur ! » Mademoiselle Shiyi jeta un bref regard méprisant sur lui. Ndlr : c’est exactement cet aspect du mépris exprimé que les éditeurs de la version popularisée excluent expressément – si j’ai lu juste : cette vulgate se situerait à la limite de l’obscurantisme pur et simple ! Cui bono ? FengSan prit congé : « Rentrez à la maison – moi, je viens plus tard ! » Le soir, elle lui dit : « J’ai fait des recherches : il s’agit d’un certain MengAnren qui habite dans la même municipalité. » Sachant qu’il était pauvre, Mademoiselle Shiyi ne l’estimait pas convenable. FengSan dit : « Quoi ! Vous aussi, vous êtes succombée aux préjugés mondaines ! Si cet homme-là de toute sa vie restait dans un état inférieur et pauvre je m’arracherais les globes oculaires pour m’avoir tellement trompés ! » FanShiyi demanda : « Alors on fait quoi ? » « J’ai l’intention de conclure un accord avec lui en lui donnant en gage un objet précis » dit FengSan « Pourquoi est-ce que ma soeur ainée a si hâte ? » objecta Mademoiselle Shiyi. Le signe 姊nous informe que FengSan est considerée la plus agée dans la relation ; sa rôle clé (elle a de la ruse, elle sait mentir) dans la lecture du chaîne des évènements est marquée « Mes parents sont là – s’ils ne donnent pas leur accord et puis ? » « C’est expressément parce que je crains que vos parents n’aillent pas consentir que j’agis ainsi » répondit FengSan « mais, rien dans la vie ne peut empiéter sur une volonté bien ferme ! » conclut-elle. C’est bien ça que les deux ont en commun : cette « volonté de puissance » Mademoiselle Shiyi toujours était d’avis que cela ne marcherait pas, mais FengSan insista : « Votre destinée matrimoniale est déjà bien décidée sans que pour autant rien n’ait été arrangé pour éviter l’enfer qui vient avec ! » « Destinée matrimoniale est déjà bien décidée » : parce que 1° dans cette société, pour les femmes c’est généralement le cas : FengSan avait déjà « entendu parler de la bonne réputation » de son amie : donc, son nom se négocie déjà « sur le marché » et que 2° la mère avait étée dépaysée à voir sa fille en « bonne compagnie » dans sa chambre privée : partant, sa destinée en a été « mue » ! FengSan reconnaît clairement qu’en ce qui concerne la vie future de son amie, le mécanisme sociétal et traditionnel s’est déjà déclenché « C’est à cause de cela que je suis venu ici » A l’instigation des servantes « pour vous rendre la gentillesse de votre amitié ! » Connotant : « et non pour réitérer le premier plaisir de notre rencontre » (« Qu’il était bleu, le ciel », R.Barthes). S’ensuit la phrase charnière du récit : « Permettez que ceci même constitue mon adieu à vous : qu’avec l’agrafe en or que vous m’avez fait en cadeau, moi, je lui en fais un en votre nom ! » Aiguillage du récit : la possibilité (utopie 1) de l’homosexualité est substituée par la possibilité (utopie 2) de l’émancipation de la femme – en l’occurrence en matière de liberté de choix d’un conjoint. Ces deux possibilités sont expressément mises de côté dialectiquement – voir la phrase suivante : Mademoiselle Shiyi fut bien disposée à discuter davantage cette matière Tout autant que le lecteur\la lectrice et l’auteur de cette nouvelle : hélas, il existent certaines contraintes qui leur interdisent une communication sans ambages mais FengSan avait déjà quitté la chambre. Exit FengSan MengAnren, qui était un étudiant pauvre mais très talentueux par ailleurs, avait bien l’intention de trouver soi-même une partenaire. Donc, jusqu’à ses dix-huit années il ne s’avait pas encore servi d’un entremetteur, du coup, les deux beautés qu’il avait vues ce jour-là lui provoquaient de considérables ruminations:-) A peu près à 10 heures du soir, Mademoiselle FengSan C’est la première fois – sauf le titre qui servirait précisément à pointer sur ce passage-ci – que FengSan et appelée « Mademoiselle » 娘 : le contraste avec la désignation de FanShiyi aurait servi à marquer une délimitation sociétale ; c’est cela qui monte à la surface textuelle, à l’occasion de la confrontation directe : « homme » et « femme » sans sanction culturelle se réduiraient bien à : « mâle » et « femelle » frappa à sa porte tout en entrant dans sa pièce en même temps ; il haussa la bougie jusqu’à la hauteur du visage de sa visiteuse et reconnut celle qu’il avait vue pendant la journée ! Ravi il s’approcha d’elle et l’interrogea. « Mon nom est Feng » dit-elle « je suis demoiselle de compagnie à Mademoiselle FanShiyi » Le bachelier était aux anges et – trève de discussions ! – Le bachelier veut court-circuiter le protocole discursif – tout autant que les deux amies chacune à son tour – mais l’image qu’il donne de lui même est clownesque : le mâle est bien à la charnière du sujet dont traite la nouvelle certes, mais son rôle est réduit à celui d’un figurant : l’ordre sociétal est inversé se précipita en avant et la serra dans ses bras. FengSan le repoussa : « Je n’agis pas en mon propre nom mais en intermédiaire ! » dit-elle. « Mademoiselle Shiyi aimerait bien contracter mariage et vous prie de contacter une marieuse. » Le bachelier médusé ne crut pas un mot, mais quand elle lui montra l’agrafe en or, il fut transporté de joie prêtant serment : « De telles attentions imparties à moi m’obligent : de rester célibataire pour toute ma vie si je ne parviens pas à marier Mademoiselle Shiyi ! » Pour deux fois seulement, le bachelier accède-t-il au discours direct : ici et sur la tombe de FanShiyi, lorsqu’en pleurnichant il adresse la parole à FengSan De grand martin, il quémanda auprès une vieille voisine d’aller voir Madame Fan. Mais la dernière trouva que MengAnren était trop pauvre et sans même consulter sa fille elle refusa le prétendant. Quand Mademoiselle Shiyi l’apprit, elle était déçue et reprocha à FengSan de lui avoir causé un préjudice :
l’agrafe en or étant difficilement récuperable Le « retour » de l’agrafe (en tant que symbole d’amitié\d’amour) connote impérativement le retour de FengSan lui-même qui avait déjà pris ses adieux, par ailleurs ; la fonction communicative du symbole n’étant plus en vigueur, maintenant il lui en faut un autre : il ne lui restait que de mourir pour faire montre de sa volonté =intention différente à celle de ses parents\de la société. La version en chinois moderne donne : « .. pour exprimer qu’elle resterait fidèle à MengAnlu », ce qui déchire le texte : 1° 之 n’est pas seulement un pronom personnel (sans parler du masculin) et 2° 矢 peut aussi signifier « pratiquer » ; « afficher ». Si, de l’autre côte, on aimerait traduire par : « pour (idéellement)
implémenter le contrat de mariage » ça ne marcherait pas non plus, l’agrafe actant déjà en tant que gage (d’amour\mariage) et alors la mort n’y serait pour rien. (Dans ce cas, il ne resterait que traduire: « implémenter le mariage avec FengSan ») En fin de compte, la mort comme signe fort a bel et bien vocation de remplacer l’agrafe en toute sa fonctionnalité amoureuse : ce serait précisément la raison pour laquelle la version popularisée fait des pieds et des mains pour escamoter le signifiant de l’auteur ! Pas longtemps après, quelqu’un qui faisait partie du gentry local était à la recherche d’une femme pour son fils : craignant ne pas pouvoir se mettre d’accord avec les parents de FanShiyi, il pria le préfet de servir d’intermédiaire. 作伐 « servir en tant que conseiller matrimonial »; mais le caractère 伐 en tant que verbe signifie, aussi : « attaquer » , « punir » ; « se vanter » En fait, ce quidam était très influent à l’époque et Monsieur Fan le redouta beaucoup. Il en tira argument pour décider Mademoiselle Shiyi à consentir au mariage – ce qui n’amusa point la dernière. Quand sa mère lui demanda une explication, elle ne fit que pleurer sans mot dire. A l’instar de FengSan, elle répond par mutisme. Mais ses larmes ne seraient plus monnaie forte dans la « bonne famille » qui est l’élément constitutif de la société Puis, un envoyé se présenta en catimini à Madame Fan pour lui dire que jamais de la vie sa fille se marierait à personne d’autre que bachelier Meng. L’ingérence d’un tiers constituerait un lourd affront à l’autorité de la maison Fan :
c’est « l’appel du programme » pour ainsi dire. Dans le déroulement du suivant (en moins du « deus ex machina » du nom de FengSan) on identifiera la tragédie « normale » et sociétale : un « fait divers », une « tragédie familiale » Lorsque Monsieur Fan l’apprit, il écuma de rage et donna sa fille en mariage à ce quidam pour de bon. Parce qu’il se douta de ce que sa fille pourrait se barrer avec ledit bachelier, il choisit le premier date convenable pour conclure mariage dans les plus brefs délais. En colère elle-même, Mademoiselle Shiyi ne prit plus de la nourriture et dorénavant passa ses journées au lit. À la veille des noces, soudainement elle se leva et se maquilla tout seul. 揽镜自妆 « en tenant le miroir d’une main elle se maquilla elle-même » : évidemment, il n’y a personne d’autre dans la chambre, mais il est possible (et après tout, cette modalité logique du possible constitue l’énérgie naturelle de l’écriture même) que FengSan s’ait introduit ce même soir et se cache parfois dans les rideaux Sa mère se réjouit
furtivement Elle n’ose pas exprimer sa joie ouvertement à cause du caractère connu de sa fille qui, de son côté, l’aurait hérité de son père:-) Le « acting out » de Mademoiselle Shiyi remplit deux fonctions différentes : pour FanShiyi il s’agit de con-vaincre sa mère, de la « toucher » ; pour FengSan il en va de disposer d’un champ de manoeuvre nécessaire pour monter la scène théatrale : il faut créer un espace libre en amenant la mère de ne plus fréquenter sa fille par crainte de susciter en elle davantage de cet énergie colérique Peu après, une servante entra en courant : « La Mademoiselle s’est pendue ! » Toute la maison était atterrée et tout le monde se lamentait de ce qu’on ne peut pas changer le cours de l’histoire. On veilla la mort pour 3 jours, puis on inhuma la défunte. De l’autre côté, bachelier Meng que l’échec de sa voisine désespérait, dans l’entretemps avait continué à contacter tout le monde dans l’espoir d’en remédier à cette impasse. Quand il apprit qu’il y avait déjà un futur mari pour sa chère, tous les liens déchirant son coeur furent cassés d’un seul coup et des fureurs inexprimables le remplirent. Peu après, la nouvelle de sa mort le précipita dans une profonde affliction et il regrettait qu’ils ne furent morts ensemble. Vers le soir il quitta la maison, profitant de la nuit pour pleurer Mademoiselle Shiyi sur sa tombe. [] Ndlr : mon lecteur numérique m’indique l’éventualité qu’un caractère du texte source n’a pas été affiché – ce que je trouve inattendu, eu égard au fait que cette même interface soit venu à bout d’un caractère-hapax (ci-dessus) Soudainement quelqu’un s’approcha de lui: c’était Mademoiselle FengSan qui dit : « Toutes mes félicitations : la mariée est prête à conclure mariage ! » « Vous ne savez pas que Mademoiselle Shiyi est morte ? » répliqua le bachelier tout en larmes. « Par « prête » c’est justement sa disparition que j’entends ! » répondit FengSan. « Maintenant il faut que vous convoquiez d’urgence les membres de votre famille pour creuser le tumulus : je dispose d’un remède miracle avec quoi on peut la ressusciter ! » dit-elle. Bientôt, ils ouvrirent la tombe et forçèrent le cercueil après quoi ils remirent soigneusement tout en l’état antérieur. Puis, le bachelier mit la dépouille sur ses épaules et rentra à la maison avec FengSan. Le corps fut déposé dans le lit et la remède fut appliquée. Lentement FanShiyi revenait à soi. Elle braqua ses yeux sur Mademoiselle FengSan, demandant : « Quel est cet endroit-ci ? » FengSan indiqua le bachelier du doigt, disant : « Voici MengAnren ! » Ce passage évidemment fait écho au moment où FanShiyi demanda le nom de FengSan lors de leur première rencontre ; la nouvelle met bien une langue patriarcale sur la sellette Puis, au fur et à la mesure qu’on lui détailla toutes les circonstances, elle s’éveillait comme d’un rêve. Après, par crainte que le secret ne fut découverte, FengSan emmena le couple à une cinquantaine de Li au loin où ils se planquèrent dans un village de montagne. Cela fait, FengSan voulut prendre ses adieux, mais Mademoiselle Shiyi pleura Chantage (« Eloge des larmes », R.Barthes) et FengSan
continuait de lui tenir compagnie, demeurant dans une autre maison. La maison traditionelle consiste de plusieurs bâtiments\pièces autour d’une cour intérieure, ici désignée par 院 ; habitée par la seule FengSan c’est l’image d’un grand délaissement. Elle évite le bachelier, bien sûr La vente des offrandes funéraires subvenant à leurs besoins, ils menaient dorénavant une vie confortable. Un jour, Mademoiselle Shiyi dit à FengSan, qui s’éloignerait instantanément chaque fois que le bachelier s’approcha d’elle, et d’un air décontracté : 从容 : 1. décontracté, à l’aise etc. ; 2. inciter, aiguillonner etc. « Il n’y a pas de distinction entre nous, au même titre qu’entre des germains. Par contre il n’y a pas de réunion séculaire : par conséquent, la solution à ce problème qui s’impose à nous c’est de nous marier à lui toutes
les deux » Littéralement : « Allons-nous prendre modèle sur les deux filles du roi mythique Yao qui les donna en mariage ensemble à son successeur Shun » : c’est précisément ce « déjà-dit » culturel\canonique qu’imposerait la solution « allant de soi » – pour FanShiyi qui veut sécuriser la vie mondaine du petit cercle et jeter les bases d’un « Paradis.V.2 » pour ainsi dire FengSan répondit : « Dans mon enfance j’ai reçu un truc prodigieux, à savoir un moyen avec lequel on peut atteindre à la longévité. Il s’agit de la respiration
taoïste : on expirera l’énergie impure, on respirera de l’énergie fraîche c’est pour cela que je ne veux pas me marier ! » Mademoiselle Shiyi ria : « Les astuces de longévité transmises de génération en génération pullulent sans jamais aider personne pour autant ! » « Ce que j’ai appris, moi, c’est quelque chose dont les séculiers ne savent rien » objecta FengSan, « tandis que cela que se transmet de génération en génération n’est point le procédé valide ! » affirmat-t-elle. Le thème de discussion que FengSan entame ici n’est point compris par son amie : tandis qu’elle dispose d’une méthode avec laquelle elle entend de son propre chef réaliser un bien, FanShiyi – en bonne fille dorlotée – part de la notion d’une disponibilité généralisée des biens qui seraient toujours déjà à la portée d’un « bon sens » : elle a la « raison paresseuse » comme dirait Immanuel Kant « Ce n’est qu’en s’appuyant sur le Tableau des Cinq Animaux du célèbre médecin Huatuo divinité de médicine qu’on ne fait pas erreur, tandis que tous ceux qui travaillent leur perfectionnement morale tout autant que ceux qui travaillent à réduire le comprimé d’immortalité 修炼 = 修身炼丹 : le faire des Taoïstes n’aspirent qu’à promouvoir la circulation non obstruée de l’énergie corporelle ! Mais si, de l’autre côté, on est atteint d’une convulsion
obstruante des voies respiratoires : 厄逆症connotant à la fois le hoquet et un malheur n’est-ce-t-il pas une preuve même de l’efficacité de la soi-disant figure du tigre, que ce spasme-là est défait aussitôt qu’on l’exécute ? » Voilà l’explication de la mort énigmatique : FengSan aurait produit une espèce d’apnée chez son amie pour tromper ses proches. Peut-être, aussi, que FengSan attacherait une position plutôt « idéaliste » à la « respiration taoïste », contrairement à une pratique « matérialiste » et usuelle – idéalisme qui sied bien à une jeune de seize ans et demi:-) La phrase suivante est juxtaposée : Mademoiselle Shiyi conspira secrètement avec le bachelier : Au lieu de poursuivre l’argumentation avec FengSan, elle procède unilatéralement à l’exécution de son plan. Auparavant, son amie s’avait également soustraite à la discussion – concernant le cadeau de fiançailles – peut-être que les traces d’un ressentiment influent sur son geste, aussi elle l’incita à faire semblant de faire un long voyage et quand la nuit tomba, elle amena FengSan à boire beaucoup de vin.Pour que FengSan se rende à proximité de FanShiyi il a fallu feindre l’absence du mâle. Ainsi toute l’économie, qui domine sur le désir de ses sujets, est affranchie (encore une fois) de la tyrannie sexuelle, traditionelle, enculturalisée etc. et l’utopie se dessine une dernière fois Quand la dernière était enivrée, le bachelier s’introduisit en cachette dans la pièce et l’humilia. Encore une fois : l’auteur sollicite une lecture active : il exige la réalisation d’un texte « scriptible » et non d’un texte « lisible » (terminologie de R.Barthes, cf. « S/Z ») qui se plaît à se vautrer dans le stéréotypique : 污 a une acception sexuelle très forte : « violer », certes, mais l’autre : « humiliation » est tout autant monnaie courante et sa signification est bien plus extensive qui – sans contrainte aucune ! permet la lecture d’une scène toute autre ! (l’ersatz mentionné ci-dessus se tire d’affaire en fournissant la phrase stéréotypique 同她发生了关系 : une manière puritaine d’affirmer qu’ils avaient bien eu des rapports sexuels à la même fois que de garder l’alibi, le mot 关系 désignant des relations quelconques, que la possibilité d’une lecture attenuée ne soit pas écartée – ce qui est faux : le stéréotypique est toujours trop violent et ne permet pas du tout des atténuations quelconques, un point, c’est tout) Subitement dessoûlé, FengSan s’écria : « Ma soeur ne veut quand même pas me faire du tort ! » 1. Signe claire de ce qu’il n’y avait pas eu de coït, sinon elle aurait désigné l’auteur au lieu de s’adresser à « sa soeur » ; 2. l’ersatz affirme – à tort – que FanShiyi a déjà nuit à FengSan : .. 害了我啦 La particule 矣 peut désigner l’accomplissement d’une action certes, mais l’acception de sa valeur subjective et estimative est tout autant valable. On pourrait avancer de manière acérée que le stéréotype d’aujourd’hui essaie de re-assujetir une femme que l’auteur avait désaliénée il y a 300 ans déjà ! 3. FanShiyi se comporte de la même manière envers son amie dont ses propres parents avaient témoignés envers elle : (d’abord ses parents « l’adoraient » puis ils la sousmirent à un mariage forçé) on dirait que la société reproduit une espèce d’acte psychotique envers le sujet libre en train d’échapper à l’économie coercitive « C’est seulement si le voeu de chasteté n’est pas rompu que la méthode taoïste est réalisable et qu’on peut atteindre à la première transcendance !» 1.色戒 « chasteté » et 色界 skr. rupadhatu (le monde matériel) sont homophones ; 2. il y aurait 36 niveaux différents dans les cieux : en s’exerçant au « Tao » les croyant.e.s atteindraient au premier étage:-) « Le fait qu’à cette heure je fais objet de machinations déloyales : je le prends pour un ordre céleste ! » Elle se leva et fit ses adieux. Mademoiselle Shiyi avança qu’elle crût bien faire et l’implora de lui pardonner. « C’est l’irrévocable ! » La traduction littérale : « franchement, je suis un renard » évidemmentfait pas l’affaire. Les êtres surnaturelles, chez PuSongling, relèvent d’un chiffrement précieux qui lui permet précisément de porter un regard critique sur sa société, d’un point de vue éloigné nécessaire pour échapper .. au stéréotype, probablement. Je dirais que cette traduction pose pas du tout de problème : la mention du « renard » désigne déjà une solution de continuité abrupte avec la « bonne » société qui saute immédiatement aux yeux : en chinois, la phrase stéréotypique « essence de renard » se réfère à la beauté féminine qui est tombée victime à la prostitution. De l’autre côté, l’irrevocabilté se rapporterait au thème dialectique (« parler » ( FanShiyi) versus « taire » (FengSan) qui structure le récit et le boucle en allouant « le dernier mot » à FengSan rétorqua FengSan « c’est parce que j’ai aperçu votre beau visage que brusquement le désir naquit. Ainsi je me suis
enfermée moi-même dans un cocon » c.à.d. empêtrée dans la causalité du monde matériel, cf. ci-dessus « à la suite de quoi les évènements d’aujourd’hui ont pu avoir lieu. » Le cocon 茧 connote la métamorphose, le renouvellement, la confirmation : c’est un « happy end » pour FengSan, aussi:-) « C’est le démon 魔 skr. Mara, mentionné déjà – corrompant le mariage en enfer des passions qui trempe dans cette affaire-ci ! En ce qui concerne nous humains de l’autre côté, on n’y est pour rien ! » L’argumentation de FengSan véritablement atteint à un niveau éthique supérieur : elle échappe au cercle vicieux des reproches et contre-reproches banaux et conduit respectivement tout le monde à la base de leurs vérités d’ordre existentialistes « Si je restais encore plus longtemps ici, le démon renaîtrerait et poursuivrait sans appel ses actes néfastes ! Live long, and prosper ! » Elle partit et le mari et femme étonnés poussaient des soupirs encore longtemps. L’année suivante, le bachelier passa les examens provincials et impériaux et réussit à l’agrégation de l’Académie de HanLin =le pinacle Il envoya un bristol à Monsieur Fan lui aussi membre d’une académie qui avait des remords et ne voulait pas l’accueillir. Quand le bachelier, après avoir insisté, lui rendit visite en lui témoignant toutes les honneurs dus au beau-père, l’honte du coléreux, croyant que le bachelier se moquait de lui, fut portée à son paroxysme. Intermezzo acerbe : les mains devraient être liées au président d’une académie quelconque en rapport avec le bachelier qui est membre de l’Académie française:-) Puis, entre quat’z’yeux la cérémonie devrait avoir eu lieu devant témoins (publiquement\en famille) le dernier l’informa. Après avoir envoyé quelqu’un pour vérifier la nouvelle, Monsieur Fan fut très heureux et avertit tous les membres de son foyer de ne pas laisser échapper un seul mot par crainte d’un cours tragique des évènements, mais deux ans après le quidam influent fut confondu de corruption et lui et son fils furent incorporés tous les deux au service militaire dans une province frontalière. Dorénavant, Mademoiselle Shiyi était en mesure d’observer régulièrement son obligation de visite parentale. Happy End total pour les protagonistes. Et qu’en est-il des autres : de celles et ceux qui habitent en dehors de la nouvelle.. ?
(ci-dessous, le Texte-Source de la dernière nouvelle)
封三娘
范十一娘, 城祭酒之女。少艳美,骚雅尤绝。父母钟爱之,求聘者辄令自择;女恒少可。会上元日,水月寺中诸尼,作“盂兰盆会。是日,游女如云,女亦诣之。方随喜间,一女子步趋相从,屡望颜色,似欲有言。审视之,二八绝代姝也。悦而好之,转用盼注。女子微笑曰:“姊非范十一娘乎?”答曰:“然。”女子曰:“久闻芳名,人言果不虚。”十一娘亦审里居。女笑言:“妾封氏,第三,近在邻村。”把臂欢笑,词致温婉,于是大相爱悦,依恋不舍。十一娘问:“何无伴侣?”曰:“父母早世,家中止一老妪,留守门户,故不得来。”十一娘将归,封凝眸欲涕,十一娘亦惘然,遂邀过从。封曰:“娘子朱门绣户,妾素无葭莩亲,虑致讥嫌。”十一娘固邀之。答:“俟异日。”十一娘乃脱金钗一股赠之,封亦摘髻上绿簪为报。十一娘既归,倾想殊切。出所赠簪,非金非玉,家人都不之识,甚异之。日望其来,怅然遂病。父母讯得故,使人于近村谘访,并无知者。时值重九,十一娘羸顿无聊,倩侍儿强抉窥园,设褥东篱下。忽一女子攀垣来窥,觇之,则封女也。呼曰:“接我以力。”侍儿从之,蓦然遂下。十一娘惊喜,顿起,曳坐褥间,责其负约,且问所来。答云:“妾家去此尚远,时来舅家作耍。前言近村者,缘舅家耳。别后悬思颇苦;然贫贱者与贵人交,足未登门,先怀惭作,恐为婢仆下眼觑,是以不果来。适经墙外过,闻女子语,便一攀望,冀是小姐,今果如愿。”十一娘因述病源。封泣下如雨,因曰:“妾来当须秘密。造言生事者,飞短流长,所不堪受。”十一娘诺。偕归同榻,快与倾怀。病寻愈。订为姊妹,衣服履舄,辄互易着。见人来,则隐匿夹幕间。积五六月,公及夫人颇闻之。一日,两人方对弈,夫人掩入。谛视,惊曰:“真吾儿友也!”因谓十一娘:“闺中有良友,我两人所欢,胡不早白?”十一娘因达封意。夫人顾谓三娘:“伴吾儿,极所忻慰,何昧之?”封羞晕满颊,默然拈带而已。夫人去,封乃告别。十一娘苦留之,乃止。一夕,自门外匆匆皇奔入,泣曰:“我固谓不可留,今果遭此大辱!”惊问之。曰:“适出更衣,一少年丈夫,横来相干,幸而得逃。如此,复何面目!”十一娘细诘形貌,谢曰:“勿须怪,此妾痴兄。会告夫人,杖责之。”封坚辞欲去。十一娘请侍天曙。封曰:“舅家咫尺,但须以梯度我过墙耳。”十一娘知不可留,使两婢逾垣送之。行半里许,辞谢自去。婢返,十一娘伏床悲惋,如失伉俪。后数月,婢以故至东村,暮归,遇封女从老妪来。婢喜,拜问。封亦恻恻,讯十一娘兴居。婢捉袂曰:“三姑过我。我家姑姑盼欲死!”封曰:“我亦思之,但不乐使家人知。归启园门,我自至。”婢归告十一娘;十一娘喜,从其言,则封已在园中矣。相见,各道间阔,绵绵不寐。视婢子眠熟,乃起,移与十一娘同枕,私语曰:“妾固知娘子未字。以才色门地,何患无贵介婿;然纨袴儿,敖不足数。如欲得佳偶,请无以贫富论。”十一娘然之。封曰:“旧年邂逅处,今复作道场,明日再烦一往,当令见一如意郎君。妾少读相人书,颇不参差。”昧爽,封即去,约俟兰若。十一娘果往,封已先在。眺览一周,十一娘便邀同车。携手出门,见一秀才,年可十七八,布袍不饰,而容仪俊伟。封潜指曰:“此翰苑才也。”十一娘略睨之。封别曰:“娘子先归,我即继至。”入暮,果至,曰:“我适物色甚详,其人即同里孟安仁也。”十一娘知其贫,不以为可。封曰:“娘子何亦堕世情哉!此人苟长贫贱者,予当抉眸子,不复相天下土矣。”十一娘曰:“且为奈何?”曰:“愿得一物,持与订盟。”十一娘曰:“姊何草草?父母在,不遂如何?”封曰:“妾此为,正恐其不遂耳。志若坚,生死何可夺也?”十一娘必不可。封曰:“娘子姻缘已动,而魔劫未消。所以故,来报前好耳。请即别,即以所赠金凤钗,矫命赠之。”十一娘方谋更商,封已出门去。时孟生贫而多才。意将择耦,故十八犹未聘也。是日,忽睹两艳,归涉冥想。一更向尽,封三娘款门入。烛之,识为日中所见,喜致诘问。曰:“妾封氏,范十一娘之女伴也。”生大悦,不暇细审,遽前拥抱。封拒曰:“妾非毛遂,乃曹丘生。十一娘愿缔永好, 请倩冰也。”生愕然不信。封乃以钗示生。生喜不自已,矢曰:“劳眷注若此,仆不得十一娘,宁终鳏耳。”封遂去。生诘旦,浼邻媪诣范夫人。夫人贫之,竟不商女,立便却去。十一娘知之,心失所望,深怨封之误己也;而金钗难返,只须以死矢之。又数日,有某绅为子求婚,恐不谐,浼邑宰作伐。时某方居权要,范公心畏之。以问十一娘,十一娘不乐。母诘之,嗼嗼不言,但有涕泪。使人潜告夫人,非孟生,死不嫁。公闻,益怒,竟许某绅家。且疑十一娘有私意于生,遂涓吉速成礼。十一娘忿不食,日惟耽卧。至亲迎之前夕,忽起,揽镜自妆。夫人窃喜。俄侍女奔白:“小姐自经!”举宅惊涕,痛悔无所复及。三日遂葬。孟生自邻媪反命,愤恨欲绝。然遥遥探访,妄冀复挽。察知佳人有主,忿火中烧,万虑俱断矣。未几,闻玉葬香埋, 然悲丧,恨不从丽人俱死。向晚出门,意将乘昏夜一哭十一娘之墓。歘有一人来,近之,则封三娘。向生曰:“喜姻好可就矣。”生泫然曰:“卿不知十一娘亡耶?”封曰:“我所谓就者,正以其亡。可急唤家人发冢,我有异药,能令苏。”生从之,发墓破棺,复掩其穴。生自负尸,与三娘俱归,置榻上;投以药,逾时而苏。顾见三娘,问:“此何所?”封指生曰:“此孟安仁也。”因告以故,始如梦醒。封惧漏泄,相将去五十里,避匿山村。封欲辞去,十一娘泣留作伴,使别院居。因货殉葬之饰,用为资度,亦称小有。封每遇生来,辄走避。十一娘从容曰:“吾姊妹骨肉不啻也,然终无百年聚。计不如效英、皇。”封曰:“妾少得异诀,吐纳可以长生,故不愿嫁耳。”十一娘笑曰:“世传养生术,汗牛充栋,行而效者谁也?”封曰:“妾所得非世人所知。世传并非真诀,惟华佗五禽图差为不妄。凡修炼家,无非欲血气流通耳。若得厄逆症,作虎形立止,非其验耶?”十一娘阴与生谋,使伪为远出者。入夜,强劝以酒;既醉,生潜入污之。三娘醒曰:“妹子害我矣!倘色戒不破,道成当升第一天。今堕奸谋,命耳!”乃起告辞。十一娘告以诚意而哀谢之。封曰:“实相告:我乃狐也。缘瞻丽容,忽生爱慕,如茧自缠,遂有今日。此乃情魔之劫,非关人力。再留,则魔更生,无底止矣。娘子福泽正远,珍重自爱。”言已而逝,夫妻惊叹久之。逾年,生乡、会果捷,官翰林。投刺谒范公,公愧悔不见。固请之,乃见。生入,执子婿礼,伏拜甚恭。公愧怒,疑生儇薄。生请间,具道情事。公不深信,使人探诸其家,方大惊喜。阴戒勿宣,惧有祸变。又二年,某绅以关节发觉,父子充辽海军。十一娘始归宁焉。
据《聊斋志异》手稿本